La problématique angolaise constitue un cas d'étude particulier dans les milieux qui traitent des questions géopolitiques, stratégiques et militaires. L'exceptionnelle durée du conflit, les enjeux économiques, l'intervention des grandes puissances, le jeu des alliances et les dérives mafieuses, ont bouleversé ce pays de l'Afrique australe, aujourd'hui exsangue bien que potentiellement très riche. C'est précisément cette richesse alimentée par des ressources importantes de pétrole et de diamant qui constitue le nerf de cette guerre civile atypique.
L'Angola dans une culture de guerre
La tragédie angolaise est l’une des plus longues et des plus pathétiques de l’époque contemporaine. Les convulsions ont débuté en 1961 par une lutte de libération contre le colonisateur portugais. Elles se sont aggravées par d’effroyables combats fratricides pour la prise du pouvoir au moment de l’accession à l’indépendance en novembre 1975. L’intervention militaire à grande échelle de l’Union soviétique et de ses alliés cubains a ensuite donné une dimension internationale à la crise et provoqué l’ingérence des États-Unis. L’Angola est alors devenu un champ d’affrontement Est-Ouest entre le monde communiste et l’Occident par Africains interposés. Après le retrait des forces étrangères de ce point chaud du sous-continent austral à la fin des années 80, les antagonismes ont retrouvé une dimension locale, mais tout aussi dramatique. Au cours des quarante dernières années, le territoire lusophone a ainsi connu successivement les souffrances d’une décolonisation ratée, les affres des rivalités de la guerre froide et les afflictions d’une guerre civile. Toutes ces secousses ininterrompues de l’histoire ont créé dans le pays une inquiétante culture de conflit et laissé une société désemparée.
La chronique de cette douloureuse déchirure a déjà été entamée dans une étude précédente (1). Les accords de paix entre le MPLA et l’Unita (2) ont toujours été violés. Aujourd’hui encore, il n’y a toujours pas de passerelle assez solide pour relier les côtés du fossé de haine qui sépare les deux mouvements antagonistes.
La fracture ethnique
Les causes du drame angolais sont d’abord de nature humaine. Les principales communautés qui composent la nation angolaise sont : les Ovimbundus (40 % de la population, essentiellement implantés dans le centre du pays), les Kimbundus (20 % répartis dans la région de la capitale Luanda et le long de la façade maritime), les Bakongos (15 % au nord-ouest) et les Lundas (8 % au nord-est). Ces deux derniers groupes sont les seuls à avoir été organisés en royaumes dans le passé. Après l’éclatement de ces royaumes, la majorité des Bakongos et les Lundas se sont fixés dans les deux Congo voisins. Ces deux ethnies sont aujourd’hui minoritaires en Angola, mais elles revendiquent leur particularisme.
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