L'« interarmisation » (jointness), fait partie du discours récurrent au sein de l'institution militaire américaine. Pourtant, c'est au mieux le terme de « cohabitation » qui s'impose lorsque l'on observe la juxtaposition des différentes armées (Services) des États-Unis pour lesquelles l'interopérabilité reste encore aujourd'hui un défi. Ceci résulte de la traditionnelle rivalité entre armées qui repose sur la confrontation de cultures stratégiques divergentes, fondatrices de l'argumentation budgétaire. Enfermée dans son discours, chaque armée tend à conduire la guerre qu'elle sait plus que la guerre qu'il faut ; toute évolution stratégique est vécue comme une période de danger au cours de laquelle il convient de parer les menaces que chaque Service fait peser sur les autres.
L'institution militaire américaine et son état-major interarmées éprouvent ainsi les plus grandes difficultés à conduire des réformes internes profondes. L'opposition entre armées correspond, au fond, à l'idée que la démocratie américaine a d'elle-même. Il n'est pas sûr qu'il existe au plus haut niveau une volonté réelle de réduire cette rivalité dans laquelle les armées, le Congrès, le président et peut-être même la toute puissance militaire américaine trouvent finalement leur compte. On voit donc mal comment, à l'avenir la rivalité entre les armées pourrait disparaître au profit de l'interarmisation.