Le War Departement a soumis le 12 avril 1947 au Congrès américain un important rapport sur les répercussions que pourraient avoir les effets de la bombe atomique sur la sécurité des États-Unis.
Documents - La bombe atomique et la sécurité nationale américaine
Pour bien comprendre les effets de la bombe atomique sur notre sécurité nationale, il est nécessaire d’examiner brièvement les possibilités de cette arme. La nature même de la bombe atomique qui relève d’une grande découverte scientifique, et les mesures de sécurité adoptées pour empêcher son développement et son emploi, ont donné naissance à de fausses interprétations qui empêchent d’évaluer correctement son efficacité.
La bombe atomique libère de l’énergie sous trois formes : 1° un rayonnement calorifique (comme dans toutes autres explosions, mais sous une forme beaucoup plus intense) ; 2° un dégagement de radiations semblables aux effets du rayon X ou d’uranium ; 3° un effet de souffle semblable aux explosions ordinaires mais beaucoup plus sévère. La température au centre de l’explosion est estimée atteindre des millions de degrés centigrades. Sur les bords de la boule de feu caractéristique on estime que la température varie entre 3.000 et 9.000° C. On constate des brûlures sur la peau jusqu’à une distance de 13.000 pieds [NDLR 2023 : environ 4 km] du point d’explosion. Cependant, la chaleur ne se fait sentir que pendant une fraction de seconde et la protection procurée par un vêtement ou l’ombre d’un bâtiment, protège d’une façon considérable à quelque distance du point d’explosion. Les effets radioactifs sont particulièrement pénétrants et sont mortels jusqu’à une distance de 3.000 pieds [NDLR 2023 : environ 1 km] du point situé directement à la verticale de l’explosion aérienne telle qu’elle s’est produite à Hiroshima et à Nagasaki. Ces effets radioactifs proviennent de rayons Gamma qui sont des rayons X excessivement intenses et pénétrants, des neutrons libérés, et des particules radioactives qui résultent de l’explosion. Les effets de ces radiations ne sont pas encore connus d’une façon précise. Dans le cas d’une explosion aérienne au-dessus de la terre ou de l’eau, il semble que l’on puisse pénétrer sans danger dans la zone exposée aux effets de la bombe après quelques heures. Par contre, la radioactivité qui résulte d’une explosion sous-marine analogue à celle de Bikini, interdit l’accès de cette zone et des bâtiments situés dans cette zone pour une durée qui peut atteindre plusieurs mois. Les effets de souffle sont analogues à ceux obtenus avec les explosifs ordinaires, mais sur une échelle beaucoup plus grande. L’énergie libérée par une bombe atomique est estimée équivalente à celle libérée par 20.000 tonnes de TNT à condition que celles-ci soient en une seule charge. Les destructions obtenues à Hiroshima et à Nagasaki couvrent une zone variant entre 3 1/2 et 7 milles carrés.
La bombe atomique n’est pas une arme d’emploi général ; en fait, à cause de sa grande puissance destructrice, son emploi est assez limité et de plus, son prix de revient est très élevé. En dernière analyse, c’est une bombe d’un type particulier spécialement adapté à la destruction d’objectifs principaux tels que : villes, concentrations industrielles et objectifs militaires importants. Dans un sens plus étroit, cette arme donne la possibilité de faire disparaître d’un seul coup de grandes agglomérations. À Hiroshima, les pertes furent de 70.000 à 80.000 tués et un nombre égal de blessés. À Nagasaki, 35.000 à 40.000 personnes furent tuées et un nombre égal blessées. La bombe elle-même est de peu d’intérêt si on n’a pas les moyens de la larguer sur le but choisi. Par conséquent, toute considération sur la bombe atomique doit tenir compte des moyens par lesquels elle sera amenée au-dessus de son objectif. À l’heure actuelle, les moyens de lancement, dans des conditions tactiques, sont limités à l’emploi de l’avion bombardier lourd à grand rayon d’action, ou au transport clandestin et à l’installation de la bombe à l’intérieur du but lui-même.
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