Influence de la puissance maritime dans l'histoire (1660-1783)
Écrit en 1890 par Alfred Thayer Mahan (1840-1914), officier de la marine des États-Unis, ce livre eut un succès foudroyant outre-Atlantique où se répandit la formule suivante : « Il n’est qu’un dieu : Poséidon, l’US Navy est son église, et l’amiral Mahan, son prophète ».
Traduit dans de très nombreuses langues dont le japonais, puis le français en 1899, cet ouvrage vient d’être réédité dans cette Bibliothèque des Introuvables, en même temps que la Trirème Athénienne de Cartault, préfacée par l’archéologue sous-marin, Patrice Pomey et le Voyage Illustré de Bougainville.
Dans cette édition 2001, ce livre de Mahan reçoit un avant-propos d’Alain Guillerm, l’auteur de La Pierre et le Vent (Arthaud Flammarion 1985) qui dirige depuis quinze ans un séminaire de stratégie navale à l’École pratique des hautes études.
Tout au long de ce premier livre, Mahan qui en publiera la suite en 1892, sous le titre The Influence of Sea-Power upon French Revolution and Empire va étudier le déroulement des opérations navales de ce qu’on appelle parfois la « Deuxième guerre de Cent ans », cette période de 1660 à 1783 qui va voir des hostilités presque continuelles entre la France et l’Angleterre et leurs alliés.
En 1890, le « virage » de la vapeur est pris, les blindages et les cuirasses sont apparu, les canons ont des culasses, torpilles et torpilleurs existent. Mahan va donc, dans son introduction, bien distinguer la stratégie navale « où les renseignements du passé ont une valeur qui n’est en rien diminué… » de la tactique navale où « …des progrès scientifiques incessants font continuellement varier les armes… et changer la manière de combattre, de manœuvrer ou de disposer les navires… ».
La grande nouveauté apportée par Mahan, et qui va assurer son succès, est sa lecture critique non seulement des opérations mais de tout l’ensemble de la conduite de la guerre : chaque chapitre de l’ouvrage est divisé en de multiples paragraphes avec pour chacun des titres très explicites du genre : « mauvais emploi des forces navales anglaises », « mérites de l’action de Suffren », « critiques de l’action de de Grasse » et dans l’ensemble d’une francophilie assez marquée.
Le leitmotiv de la puissance maritime qui doit s’appuyer sur une marine de commerce « sans laquelle, une marine de guerre ne peut trouver une base réellement solide » et sur une marine de guerre « proportionnée à l’importance du commerce et des intérêts qui lui sont liés » est en fait dirigé vers l’opinion américaine. Ce livre est un plaidoyer pour le développement de la puissance maritime américaine et comme le souligne Alain Guillerm dans son avant-propos, cet objectif sera atteint en 1922 au traité de Washington où la parité entre flottes anglaises et américaines est acquise. Mahan est mort depuis huit ans alors ; les événements qui se sont succédé depuis lors : guerre de 1939-1945, grandeur et décadence de la flotte soviétique, guerre des Malouines, hégémonie des forces militaires des États-Unis, témoignent de sa vision dans un domaine qui dépasse largement la stratégie. ♦