Géopolitique de l'apocalypse, la démocratie à l'épreuve de l'islamisme
C’est un livre modeste, annonce l’auteur. Le titre ne l’est pas. La géopolitique, discipline définie tant bien que mal par les précurseurs à la fin du XIXe siècle, est devenue l’un de ces concepts boulimiques pour lesquels tout fait ventre. On lui offre ici un aliment nouveau : l’apocalypse, promise par les nouveaux terroristes. Géopolitique ou pas, l’objet est clair. Au départ est le 11 septembre, et la colère suscitée par l’horreur de l’attentat sans doute, mais aussi par l’ignoble commentaire, « les Américains l’ont bien cherché ». Frédéric Encel et Oriana Fallaci, même combat ! La colère s’ordonne en trois parties : ce que ne fut pas le 11 septembre, la guerre des États-Unis contre Al Quaïda, celle que devrait mener la France.
Clarification, d’abord. L’auteur stigmatise le « dévoiement sémantique » qui assimile aux kamikazes les terroristes du 11 septembre. Ceux-ci sont les enfants de l’islamisme radical, dont on rappelle opportunément la généalogie et le rôle éminent qu’y tient le wahhabisme saoudien. On réfute ensuite le lien établi par les commentateurs entre le combat d’Al Quaïda et le sort des Palestiniens, dont Ben Laden ne se soucie pas. Oussama le milliardaire, enfin, est mal venu à soutenir la révolte des pauvres, dont on nous rebat aussi les oreilles.
L’enjeu de la lutte est ailleurs. Il n’entre pas dans nos schémas habituels : l’apocalypse annoncée sort du champ de la politique. Voire ! Peut-être l’auteur eût-il mieux nommé son livre « Géopolitique du sacré ». Il eût alors rappelé que, pour le musulman conséquent, religion et politique ne font qu’un, et constaté que Georges W. Bush, définissant « l’axe du mal », se place sur le même terrain. Au demeurant, lorsque Frédéric Encel, s’écartant de sa thèse centrale, veut cerner la stratégie d’Al Quaïda en termes banals (déstabilisation de l’Arabie saoudite et du Pakistan, menace nucléaire islamiste) il ne convainc pas.
La dernière partie est plus cohérente. La France, dans la lutte contre le « troisième totalitarisme », est en première ligne. Le politiquement correct pro-islamique l’empêche de prendre la mesure de la menace. Face à nos musulmans, que faire ? « Je propose la France », répond fièrement Frédéric Encel. Il faut réapprendre l’histoire aux enfants, la vraie peut-être, mais aussi celle des « mythes fondateurs », aujourd’hui frileusement occultés. Si la France ne s’aime pas, qui donc voudra s’y intégrer ?
On suivrait ici l’auteur sans réticence s’il ne se fourvoyait pas sur l’enseignement des religions au collège. Il s’agit, bien sûr, d’un enseignement « désacralisé », mais on voit où l’auteur veut en venir, qu’il ne dit pas : le sacré est le ressort des querelles inexpiables et des cruautés extrêmes ; la politique est l’art du moindre mal. Il faut en écarter les chevaucheurs d’apocalypse. ♦