À l’heure où les comparaisons franco-britanniques vont grand train concernant la défense et où, en France, le financement des instituts de recherche semble plus que jamais problématique, il est intéressant d’analyser l’organisation des pôles de réflexion stratégique en Grande-Bretagne, tout particulièrement dans le domaine de la sécurité et des relations internationales. Car sans même évoquer les départements recherches et analyses des ministères de la Défense (MOD) et des Affaires étrangères (FCO), les cellules prospectives des services de renseignements, les officines francs-maçonnes ayant pignon sur rue et la presse spécialisée, il existe outre-Manche une nébuleuse d’une quinzaine d’instituts et de centres de recherche amalgamant universitaires, hauts fonctionnaires, militaires, pairs du royaume, mais aussi assureurs, avocats, banquiers et industriels en tout genre. Malgré leur connotation académique ou étatique, ces instituts et ces centres de recherche, empreints de culture libérale, ont su renoncer à une pratique d’assistanat pour développer des logiques managériales et entrepreneuriales dictées par un impératif de rentabilité économique. Au fil du temps, ces think tanks, qui n’hésitent jamais à coopérer entre eux pour promouvoir des synergies gagnantes, ont su occuper le terrain de la recherche et développer une stratégie d’influence mondiale débordant très largement la sphère de l’académisme. Grâce à ce réseau d’influence noyauté par d’anciens ministres, diplomates, chefs d’entreprises, hauts fonctionnaires et généraux, le gouvernement britannique dispose, au-delà d’un simple laboratoire à idées, d’un outil crédible capable, lorsque cela s’avère nécessaire, de véhiculer urbi et orbi les idées maîtresses de sa politique étrangère.