L'armée allemande et le complot du 20 juillet 1944
Au moment de la prise du pouvoir par Hitler, le 30 janvier 1933, les officiers de la Reichswehr étaient, en grande partie, monarchistes ou nobles, mais on avait déjà relevé la présence des infiltrations nazies parmi les jeunes. Le procès de trois lieutenants de la garnison d’Ulm, sous l’inculpation de création dans l’armée d’une cellule nazie, intenté par le général Grœner, ministre de la Reichswehr et au cours duquel le général Beck a déposé en faveur de ses anciens subordonnés, était le premier symptôme d’un courant nouveau. L’un des accusés, le sous-lieutenant Scheringer, devenu par la suite communiste, milite actuellement dans les rangs de ce parti.
Dans l’avènement du IIIe Reich, les officiers n’ont vu qu’un fait politique qui permettrait de briser les chaînes du traité de Versailles et de procéder au réarmement de l’Allemagne. Même l’assassinat du général Schleicher, fait sans précédent, n’a pas provoqué une vive réaction dans le corps des officiers. Mais bientôt il fallut se rendre compte que la conception de l’armée formulée par les chefs du parti nazi n’était pas celle de l’état-major et que la formation des S. A. et, après leur dissolution, celle des S. S., allait opposer à l’armée une force dans laquelle la tradition avait fait place au dynamisme. En face des généraux de la Reichswehr s’est dressée une autre lignée de généraux des S. S., les Daluege, von Fritsch, Heydrich, enseigne de vaisseau démissionnaire, Lutze, Himmler, Wolff et autres Obergruppenführer, couverts d’honneurs en peu de temps.
Non seulement les officiers ont sacrifié au redressement militaire du, Reich l’indépendance de l’armée, mais les généraux ont éliminé les S. A. avec l’aide des S. S., devenus leurs propres bourreaux. Même dans les représailles du 30 juin 1934 contre le capitaine Roehm et ses complices, auxquelles certains généraux avaient contribué, ils n’ont vu que la disparition du protagoniste du soldat politique et n’ont pas réagi contre l’assassinat du général von Bredow. « Messieurs les généraux ont vécu ces années en plein réarmement, sur un grand pied, écrit Gisevius. L’argent ne jouait aucun rôle au ministère de la Guerre. Aucune collectivité n’a causé en Allemagne tant de désillusions que le corps des officiers. Là étaient les seuls hommes qui pouvaient se servir de leurs armes sans être soumis à la pression de la Gestapo. Mais ils n’ont pensé qu’à l’œuvre militaire et rarement à une chose bien supérieure à la brillante carrière qui s’ouvrait devant eux (1). »
Il reste 94 % de l'article à lire
Plan de l'article