Il n’entre pas dans notre propos de décrire avec précision les ressorts complexes de la finance islamique, mais plutôt de permettre au lecteur de mieux comprendre la façon dont se constituent les ressources financières des acteurs islamiques, et les raisons pour lesquelles tenter d’en tarir les sources se révèle particulièrement difficile.
Solidarité musulmane et finance islamique
Muslim solidarity and Islamic finance
The intention here is not to describe precisely the complex scope of Islamic finance, but rather to give the reader a better understanding of the ins and outs of Islamic financial resources, and the reasons why it is particularly difficult to block its sources.
Si les grands monothéismes prescrivent tous un devoir de charité envers les plus démunis, il existe une différence significative entre leurs conceptions respectives de la bienfaisance : la charité chrétienne procède de la compassion vis-à-vis de la souffrance du pauvre, mais aussi de la mauvaise conscience du chrétien pour qui le déshérité constitue un modèle. Ce vœu de pauvreté exaltée n’existe pas dans l’islam. Pour autant, celui-ci reste l’unique religion révélée à avoir institutionnalisé et codifié ses principes de bienfaisance, en faisant non seulement un devoir moral mais encore une obligation légale. La richesse, potentiellement dangereuse car génératrice de tentations, peut être purifiée dès lors que l’on en redistribue la partie superflue. L’islam préconise donc sans complexe à la fois un libéralisme économique individuel et une socialisation redistributive et égalitaire.
Les fondements religieux de la solidarité musulmane
Le Coran fait de la justice, de la bienfaisance et de la solidarité les bases de la sociabilité au sein de la umma, communauté des croyants qui toujours doit être préservée. Deux institutions en constituent les piliers : la zakat, aumône obligatoire, et la sadaqa, aumône complémentaire volontaire.
La zakat, souvent mentionnée dans le Coran, constitue le troisième pilier de l’islam après la profession de foi (chahada) et la prière (salat). La doctrine énumère plusieurs catégories de bénéficiaires : les indigents placés dans l’impossibilité de subvenir à leurs besoins ; les personnes insolvables, à condition que leurs dettes aient été contractées pour des affaires n’ayant pas contrevenu aux lois et prescriptions divines ; les « voyageurs », catégorie incluant réfugiés, fugitifs et déportés, ou ceux se trouvant dans l’incapacité de se servir de leur argent. S’y ajoutent les nouveaux convertis (ou ceux susceptibles de se convertir) « dont les cœurs doivent être récompensés » par un don, ainsi que les musulmans vivant dans des régions frontalières de pays hostiles à l’islam ; enfin les administrateurs des affaires de la zakat (collecteurs, trésoriers, comptables). Une place particulière est accordée aux enfants orphelins (le Prophète ayant été orphelin très jeune), c’est-à-dire, même si leur mère est toujours en vie, les enfants ayant perdu leur père, guide spirituel et pivot économique de la famille.
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