Le terrorisme à visage humain
Le terrorisme à visage humain
Ce livre militant (et véhément) d’un homme d’Église, universitaire et proche de Jean-Paul II, tire une grande partie de son intérêt du fait que Michel Schooyans ne se contente pas d’affirmations et d’interdits en forme de slogans à propos des pratiques contraceptives et abortives. Il dissèque le problème avec une indéniable compétence et n’hésite pas à passer à la contre-attaque en dénonçant l’enchaînement des manœuvres qui embobinent même certains chrétiens réduits au rôle d’« innocents utiles ». Sur des exemples puisés dans nombre de pays (dont le Brésil qu’il connaît bien), il énumère les étapes de la « tactique du salami » par laquelle les « camelots de la mort… porteurs d’une idéologie nihiliste » visent la « déconstruction systématique » de la famille et de la société. Ainsi s’instaure de manière feutrée un terrorisme « soft », d’ailleurs largement soutenu et financé par les organisations internationales.
Mais revenons au cœur du sujet, celui du malthusianisme et de son instrument, le contrôle des naissances. Outre les porte-parole des « droits des femmes », les partisans se déclarent soucieux de réduire l’accroissement démographique (fût-ce par des « mesures limitatives autoritaires »… qui font un peu penser aux points du permis de conduire !), en particulier dans les régions souffrant d’un « low cultural level » et dans les « bas quartiers accablés par la pauvreté ». À cet effet, on s’appuie sur un certain « tableau de Jaffe » dont il est vrai que la consultation donne froid dans le dos et qui est pourtant déjà partiellement en voie d’application ici ou là. Notons qu’on s’achemine ainsi plus généralement aussi bien vers l’eugénisme que vers l’euthanasie et l’élimination de tous les inutiles en vertu d’un impeccable raisonnement de nature commerciale.
L’apparition de la pilule en 1956 a permis d’afficher une bonne conscience en distinguant la contraception, barrière empêchant le déclenchement du processus de procréation, et l’avortement qui l’interrompt. Peut-être mal informé, Paul VI est resté discret sur cette affaire dans l’encyclique Humanae Vitae, mais vingt-sept ans plus tard, le Pape appela « un chat un chat » dans Evangelium Vitae. Pour lui, le, contraceptif n’est jamais qu’un « abortif précoce » et dont l’usage pose le problème de la dissociation entre « morale de la vie et morale de l’amour ».
L’auteur en appelle alors aux hommes politiques, les exhorte à ne pas « institutionnaliser le crime » par une « parodie du droit » et à ne pas adopter une « morale élastique » qui s’en prend aux innocents et débouche sur un totalitarisme. À l’image du roi Baudoin, ces responsables doivent faire jouer l’objection de conscience et ne pas se contenter de déléguer au corps médical. Et pour ce qui est des dignitaires de l’Église hésitants, rappelons-leur qu’« ils n’ont pas pour mission d’expliquer comment faire pour pécher confortablement ».
Le procureur a bonne plume et connaît son dossier. Il revient à chaque lecteur d’être convaincu, de persister dans le doute ou de plaider en sens inverse. ♦