La Syrie au présent. Reflets d'une société
La Syrie au présent. Reflets d'une société
Il manquait un livre de référence sur la Syrie. Cette lacune est à présent comblée. Ouvrage à plusieurs voix, La Syrie au présent propose une analyse érudite d’un pays au cœur des enjeux culturels, religieux, économiques et géopolitiques du Proche-Orient, mais qui, en France, demeure étrangement mal connu ou, le plus souvent, réduit à des clichés.
Le livre s’attache à brosser un portrait exhaustif de la Syrie contemporaine. Les enjeux liés au territoire, l’évolution de la population, la religiosité et les religions, la culture, l’économie, le droit, la politique intérieure et l’insertion de Damas dans la dynamique régionale sont les grands axes de recherche qui guident les contributeurs, d’horizons très divers : politiste, géographe, historien, artiste, archéologue, médecin, économiste, etc. Ces approches diverses favorisent une analyse de la Syrie éloignée du schéma réducteur « dictature sunnite arabe baassiste » dans laquelle on l’a souvent enfermée.
Ainsi, le lecteur découvre des facettes méconnues ou inconnues de la vie religieuse, sociale ou géopolitique de cette Syrie aux mille et un visages : la territorialisation des alaouites, la prégnance du soufisme, le projet politique des Frères musulmans, l’activité de prostituées irakiennes de quinze ans, le poids économique d’Alep (seconde ville du pays), le passage du socialisme d’État à l’« économie sociale de marché » officialisé en juin 2005, l’alliance régionale entre Damas et Téhéran ou le poids du Parti baas sont analysés dans une perspective résolument pluridisciplinaire.
La Syrie a été façonnée par Hafez al-Assad. Légitimé par la Constitution de 1973 qui accorde d’importants pouvoirs au président, le régime syrien mêle socialisme et nationalisme, anti-impérialisme et antisionisme. Puissance régionale moyenne, Damas se pose en trouble-fête du Proche-Orient : alliée avec l’Iran depuis 1979, financée par les pays du Golfe, elle n’en recherche pas moins depuis 1991 un rapprochement avec les Américains. Au cours de ses trente ans de règne, Assad a positionné son pays, économiquement exsangue, militairement limité et géographiquement exposé à une opération punitive israélienne, comme un intermédiaire de la guerre et de la paix au Moyen-Orient.
En juin 2000, la succession de Bachar, son second fils, ne remet pas en cause les grandes orientations du régime : moins convaincant que Mohammed VI et Abdallah II de Jordanie, Bachar met l’accent sur la lutte contre la corruption et l’ouverture de l’économie étatisée au secteur privé. Chargé jusque-là du dossier libanais, il prend les rênes d’un régime ébranlé par une succession de chocs : guerre du Golfe, chute de l’URSS, processus d’Oslo, rapprochement israélo-jordanien, guerre en Irak. Montrée du doigt pour sa responsabilité présumée dans l’assassinat du Premier ministre libanais Rafic Hariri, la Syrie est contrainte d’évacuer le Liban au printemps 2005. Très isolée, elle ne dispose plus que d’une marge de manœuvre géopolitique presque nulle.
Œuvre collective, cette somme magistrale vient à point nommé éclairer les enjeux économiques et géopolitiques qui agitent cette caisse de résonance moyen-orientale qu’est la Syrie. Du conflit israélo-arabe à la question kurde en passant par la stabilisation de l’Irak post-Saddam, le régime de Damas demeure un acteur important. ♦