Revue des revues
• Rivista Marittima, novembre 2008 : « Le Livre blanc vu d’Italie (la fin de la défense gaulliste) ».
Le numéro de novembre de Rivista Marittima, revue officielle du ministère de la Défense italien, commence par un article de Renato Giocondo sur le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale français de 2008. Il nous paraît opportun d’en publier ce compte rendu.
L’heure du grand changement stratégique
Pour les Italiens, il est clair que le Livre blanc marque une véritable rupture dans la politique de défense et de sécurité de la France. En prônant un rapprochement avec l’Otan et le développement d’une Europe de la Défense, la France apparaît tout à fait consciente des problèmes posés par le nouveau contexte international. Nicolas Sarkozy s’est rendu compte que son pays « n’a plus les moyens de l’action unilatérale, ni ceux de maintenir l’exigence française d’autonomie militaire et les marges de manœuvre pour affaiblir le traditionnel lien euro-atlantique ». Alors que la tradition stratégique française, héritée du fondateur de la Ve République, était jugée « stérile et anachronique », celle de 2008 apparaît résolument moderne et efficace ; notamment grâce à la conception d’une défense globale où tous les Européens travailleraient ensemble dans le cadre de l’Otan.
L’apparition de la nouvelle fonction stratégique « Connaissance et Anticipation » est également saluée car, désormais, les cinq fonctions « ne sont pas envisagées séparément, mais dans une optique intégrée ». La stratégie française est donc quasiment exemplaire pour les Italiens.
L’effondrement du « temple gaulliste »
Tous les changements annoncés par le Livre blanc sont donc perçus, en Italie, comme un nouveau départ pour la défense française.
L’auteur note cependant que le Livre blanc « change en profondeur la traditionnelle approche française d’autonomie du pays ». En faisant cela, c’est une rupture avec la stratégie d’indépendance lancée par le général de Gaulle ; jamais réellement remise en cause par ses successeurs. Pour Renato Giocondo, la posture de Nicolas Sarkozy, qualifié de gaulliste libéral, s’explique par l’obligation de réintégrer l’Otan, et donc de trahir la position historique si la France souhaite conserver son rang dans le monde : « Il semble que Nicolas Sarkozy l’a compris et que ce fils spirituel du gaullisme soit déterminé à inverser le cours des choses, abattant d’un seul coup les colonnes du temple gaulliste ».
Renato Giocondo, et plus généralement le ministère de la Défense italien (1), est donc satisfait de la nouvelle orientation stratégique de la France présentée dans le nouveau Livre blanc. Le rapprochement avec l’Otan et le développement de l’Europe de la défense sont les décisions qui suscitent le plus de soutien. Le nouveau format des armées est également loué ; aucune critique n’étant émise sur les diminutions d’effectifs, car « dans l’immédiat on doit constater l’intime conviction du Président de faire des choses utiles, même si cela contrarie l’opinion. Il est clair, pour Nicolas Sarkozy, que se baser sur le passé n’est plus possible et que, de toute façon, il est préférable d’avoir un modèle de défense moins ambitieux sur le plan international et plus efficace, plutôt qu’un modèle avec trop d’hommes, peu formés et peu équipés ». ♦
(1) Rivista Marittima étant la revue du ministère de la Défense.