Du fait de l’extraordinaire accélération des mutations, de la complexification des enjeux et, surtout, de la survenance d’un « risque global », la mondialisation, bien que se situant dans le prolongement de l’aventure humaine, constitue une révolution historique sans précédents. Pour la première fois depuis que nos ancêtres se séparèrent pour coloniser les continents, nous sommes unis dans une communauté de destin. Ce qui exige que l’on dépasse nos différences et nos égoïsmes pour inventer une nouvelle gouvernance mondiale, seule solution à l’épée de Damoclès qui menace la planète.
Globalisation : enjeux et perspectives
Le particularisme linguistique, culturel et intellectuel français prend tout son relief avec l’analyse du processus de globalisation ! Lorsque nous empruntâmes ce concept, nous traduisîmes globalization tout d’abord par le terme plus familier de « mondialisation » avant d’intégrer la traduction littérale : « globalisation ». Deux mots pour le prix d’un ! Il fallait donc inventer deux définitions séparées et, pourquoi pas, créer des approches différentes qui prennent en compte les travaux de nos chercheurs. Pour certains, le premier mot devait caractériser la circulation des hommes, des capitaux et des idées, incluant éventuellement la prise de conscience de l’universalité naissante et pourquoi pas l’existence de forces cherchant à structurer la réorganisation planétaire au profit d’une élite. La mondialisation n’était plus alors un simple processus s’inscrivant dans une continuité historique, mais le résultat d’une manipulation orchestrée par le grand capital. Lénine revenait à la vie ! Le terme de globalisation se rapporterait, quant à lui, aux nouvelles interconnexions et interdépendances économiques locales, régionales et globales engendrées par la mondialisation et dont il serait l’épiphénomène. Inutiles et stériles, ces débats sémantiques masquent une réalité à la fois simple dans son principe et complexe par son ampleur et sa nature : la mondialisation est le résultat d’un processus de globalisation. Par définition, celui-ci affecte l’ensemble des acteurs, États, entreprises et individus, les insérant dans une dynamique qui transforme peu à peu le système tout entier autant que les éléments qui le composent. Il faut donc comprendre la mondialisation dans son expression générale de totalité, autant que par ses manifestations singulières, la dynamique qui unit le tout à chacune des parties exigeant qu’on appréhende le processus en tenant compte de sa réalité complexe, multiscalaire. La gouvernance elle-même est affectée par cette multiplication des échelles qui fait que l’État, non content d’abdiquer une partie de sa souveraineté en faveur d’instances intergouvernementales par le biais de traités librement négociés, concède aux collectivités locales des responsabilités qu’il ne peut plus ou ne veut plus assumer.
…multidimensionnelle et dynamique
Tout phénomène social est par essence multidimensionnel. Les perspectives économiques, politiques ou socioculturelles ne sont que des prismes traduisant un aspect d’une réalité toujours infiniment plus complexe. Pour quelles raisons extraordinaires en irait-il alors autrement de la mondialisation ? Comment une dynamique aussi puissante pourrait-elle se réduire au seul processus d’intégration du marché mondial ? De fait, même s’il fallait considérer l’angle économique comme la dimension essentielle du processus, comment imaginer que les mutations qu’il engendre n’aient pas de conséquences sociologiques, culturelles, juridiques, politiques et géopolitiques majeures ?
Tout processus présuppose l’existence d’un faisceau d’interactions. Or, inévitablement, ces dernières engendrent un changement entre l’état de chacune des parties avant et après l’échange, aussi mineur et imperceptible soit-il. Inhérente à toute société, la fonction d’échange, qu’elle soit de nature économique, politique ou culturelle, impose donc une évolution progressive qui fait qu’aucune société, jamais, ne peut être considérée comme statique. Et cela d’autant que la somme des interactions affectant un système social est, par nature, multidimensionnelle ! Cependant, le rythme avec lequel s’opère le changement, imposant une mutation visible des parties et du tout, diffère d’un cas à un autre et, surtout, selon les époques ! La chose est évidente si l’on considère que la dynamique varie selon les outils qui sont mis à disposition des différentes formes d’échange (commerce, communication…). Si l’avancée technologique contribue à accélérer et à fluidifier les interactions, il est logique de prétendre que le « progrès » accélère les dynamiques intra et inter-sociétales, ce qui explique dans une large mesure l’accélération spectaculaire avec laquelle se transforme la société contemporaine. Il y a en quelque sorte un changement dans le changement !
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