Troisième doctrine militaire russe depuis la fin de la guerre froide, le document du 5 février dernier n'apporte guère d'éléments nouveaux sur la posture stratégique de la Fédération de Russie. Le temps des débats et de la dialectique semble passé. Le temps d'un nouveau Traité paneuropéen de sécurité commencerait-il ?
La doctrine militaire russe : une doctrine pour rien ?
Russian military doctrine: a doctrine for nothing?
On 5 February, Russia published the third version of its military doctrine since the end of the Cold War, a document that brings virtually nothing new to the posture of the Russian Federation. The time is perhaps right to end debate and analysis and to look anew at a pan-European security treaty.
Le 5 février 2010, le président russe a officiellement « approuvé » le texte, préparé par le Conseil de sécurité, portant sur la « Doctrine militaire de la Fédération de Russie » (1). Ce texte, attendu depuis longtemps déjà, et dont la sortie était annoncée comme imminente depuis le milieu de l’automne 2009, est le troisième du genre. Il est destiné à remplacer le document « de transition » précédent datant de 2000 lequel se substituait au document que l’on pouvait qualifier de prématuré, publié en novembre 1993. Le document actuel est relativement bref, une quinzaine de pages, et comporte 53 articles répartis en quatre parties : généralités ; risques et menaces militaires ; politique militaire de la Fédération de Russie ; moyens militaro-économiques de la défense. Chacune de ces parties se compose plus d’une succession d’éléments schématiques que d’une analyse — fût-elle superficielle — des sujets abordés, se différenciant, de fait, des textes de 2000 et de 1993. Le document de 2010, au moins dans sa partie publique, s’illustre par une grande pauvreté de fond, de forme, par une absence, encore plus cruelle que dans les précédents textes, d’innovation : un texte d’autant plus décevant qu’il était très attendu. En un mot, rien de très nouveau, ce qui n’a pas empêché certains « observateurs » d’en faire des commentaires alarmistes ! Toutefois, et c’est peut-être ce qui distingue ce texte des précédents, experts et médias se sont régulièrement fait l’écho, depuis plusieurs mois, de la préparation, en parallèle, d’un autre document, classifié celui-là. On connaissait cette pratique ; on n’en avait jamais fait état aussi explicitement.
Le texte de la doctrine : le fond et la forme !
La première partie du document — « généralités » — propose une série de définitions de « concepts » tels que sécurité, risque et menace militaires ; conflit, conflit armé, guerre locale, régionale et à grande échelle ; politique militaire, organisation militaire de l’État, planification militaire, autant de termes que l’on retrouvera dans les différentes parties du texte. Toutefois, ces définitions ressortissent plus à la logique d’un lexique, utile certes, que d’une analyse conceptuelle, contrairement au texte de 2000 nettement plus précis sur le même sujet.
La suite du texte adopte un ton et une forme encore plus « administrativement corrects » et plus proches de la présentation powerpoint que du texte rédigé. Comme de nombreux autres points du document, les articles se présentent le plus souvent sous la forme d’un catalogue purement descriptif et à peine rédigé. Si l’on passe sur cette question de forme qui l’apparenterait plus au « projet » de doctrine présenté en octobre 1999 et soumis à discussion avant adoption du document officiel d’avril 2000, le contenu de cette partie « généralités » n’apporte, là encore, rien de bien nouveau par rapport au texte de 2000.
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