Dans cette vaste rétrospective, l’auteur explique l’éviction progressive des pays arabes de la gouvernance générale du Moyen-Orient. Sous l’impulsion américaine, un système organisé autour de nouveaux pôles s’est mis en place subrepticement. N’y manquaient que l’Irak, en voie de dislocation, et l’Iran, en voie de normalisation.
Le Moyen-Orient dans tous ses États
Middle East countries in a terrible state
In this vast retrospective, the author explains the progressive eviction of Arab states from the general governance of the Middle East. Under American pressure, a system organised around new poles has been surreptitiously installed. Missing from the picture is Iraq, in a process of dislocation, and Iran, on the way to normalisation.
Pourquoi les Américains sont-ils intervenus en Irak ? Cette question voilà maintenant sept ans qu’elle se pose sans qu’aucune réponse claire n’ait été apportée. Une thèse existe pourtant et mérite que l’on s’y arrête quelque peu. Tout part d’un constat : aucune des explications existantes n’est satisfaisante. L’Irak de Saddam Hussein détenait des armes de destruction massive ? On les cherche encore. Les États-Unis ont besoin du pétrole irakien ? Ils l’avaient déjà. Washington voulait se défaire de l’Arabie saoudite ? Les relations n’ont jamais été aussi bonnes entre les deux États. Il s’agissait de surveiller l’Iran ? Vu les objectifs et intérêts stratégiques partagés, il y a fort à parier que le pays perse sera dans quatre ou cinq ans l’allié privilégié des États-Unis dans la région. En somme, la question demeure… L’Histoire sans doute nous donnera quelques indices.
En 1916, avant même que l’empire Ottoman ne se démantèle, les grandes puissances de l’époque, la France et la Grande-Bretagne, pour des raisons différentes, ont voulu créer des États-nation. Ce fut un succès. Dans tous les pays de la région, en effet, cette période reste une période faste à la fois du point de vue social et culturel, mais également économique et politique. Un véritable bouillonnement intellectuel se produisit alors.
Dans les années 50, après les indépendances, lorsque s’affrontent la Oumma Arabiya, portée par les nationalistes arabes et qui signifie « nation arabe » et la Oumma Islamiya ou « communauté islamique sans frontières » portée par l’Arabie saoudite, l’Occident va diaboliser Nasser et favoriser les réserves pétrolières prouvées du désert arabique. Ainsi, en 1957, les États-Unis entraînent-ils la France et la Grande-Bretagne, deux puissances à bout de souffle, dans une alliance stratégique avec l’Arabie saoudite. Cette alliance sonne le glas du processus de sécularisation des sociétés du monde arabe. Les dictatures — que certains diplomates appellent pudiquement les « ruptures de représentativité » — commencent à s’installer dans la région et le fondamentalisme musulman est instrumentalisé pour contenir la gauche dite « nassérienne » qui tenait essentiellement les syndicats et les universités. À cette date, les États-Unis ne sont pas encore dans la région. Ils y viendront en 1967 au moment de la guerre des Six Jours. Avec ce conflit, la politique française change. De Gaulle qui avait dit des Israéliens qu’ils étaient « ce peuple sûr de lui et dominateur » opte pour une politique arabe et les États-Unis installent leur premier ancrage stratégique.
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