Politique et diplomatie - Le Moyen-Orient et les rapports américano-soviétiques
Beaucoup plus que par des caractéristiques géographiques communes, l’expression de « Moyen-Orient » (Middle East) se justifie par l’unité du point de vue stratégique de la région ainsi considérée. Unité stratégique dans l’optique occidentale s’entend. Dès 1902, avant donc la découverte du pétrole, l’amiral A.T. Mahan (1) avait souligné l’importance décisive du Moyen-Orient, Golfe compris, en tant que zone de contact entre les puissances rivales, la Grande-Bretagne d’une part, la Russie et secondairement la France de l’autre.
En 1903, Valentine Chirol (2) définit ainsi le Moyen-Orient : « les régions d’Asie qui s’étendent aux frontières de l’Inde ou commandent les frontières de l’Inde et qui en conséquence sont en rapport avec les problèmes de la sécurité politique, tout autant que militaire, de l’Inde ». Pour Chirol : « la question du Moyen-Orient est le résultat de la projection constante des forces européennes, morales, commerciales et militaires en Asie, projection qui transforme lentement mais d’une manière continue, toutes les conditions qui ont permis à la Grande-Bretagne d’acquérir une position d’hégémonie sans égale sur le continent asiatique ».
En 1949, Ernest Bevin définissait à son tour le Moyen-Orient comme « la zone qui s’étend de Corfou à Kaboul, qui vient immédiatement après l’Europe en importance stratégique, du point de vue de nos intérêts globaux ». La note du Foreign Office (3) qui contient cette définition ajoutait « il existe des liens traditionnels entre l’Afghanistan, la Perse et la Turquie et, du point de vue soviétique sinon du nôtre, l’Afghanistan est stratégiquement important pour la défense du Moyen-Orient. L’inclusion de l’Afghanistan dans un pacte du Moyen-Orient serait par conséquent logique » (4). Et dans la même note Bevin remarquait : « une fois le pacte atlantique conclu, nous serions alors libres de prêter plus d’attention à la zone qui s’étend de Corfou à Kaboul ». De cette vision stratégique que Dean Acheson partageait avec Bevin, en dépit de désaccords momentanés sur les mesures à prendre, découlent les projets de Middle East Command, de Middle East Defence Organization, de pacte militaire méditerranéen, le pacte de Bagdad, le CENTO, qui tous comportaient un lien plus ou moins formel avec l’OTAN.
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