À l'occasion des journées d'étude défense et recherche universitaire, les 19 et 20 septembre 1984, l'auteur a présenté un rapport très clair sur les données de l'environnement international, volontairement limité, en raison du temps imparti, à certains « points d'ancrage ». C'est ce rapport qui est reproduit ici.
Les données de l'environnement international
Pour l’analyste de la réalité internationale, il n’est rien de plus dangereux que de succomber aux tentations de la mode intellectuelle. Il y a quatre ans, à la veille des élections américaines de 1980, en pleine crise des otages à Téhéran, il était de bon ton de s’inquiéter du déclin des États-Unis. Aujourd’hui, le « mal américain » a fait place au « miracle américain. ». Rien de plus significatif à cet égard que le contraste entre le dossier de Time Magazine sur le ressort des États-Unis et celui de Newsweek sur le déclin de l’Europe. On peut penser que l’optimisme de 1984 est aussi exagéré que l’était le pessimisme de 1980.
Présenter en cinquante minutes les données du contexte international constitue un exercice périlleux qui suppose un survol planétaire nécessairement superficiel et incomplet et, par essence, subjectif. Souhaitant aller à l’essentiel, je donnerai trois points d’ancrage à mon exposé : les relations Est-Ouest, l’état des alliances, ou, pour éviter de tomber dans l’amalgame, l’état de l’alliance occidentale et celui du bloc soviétique, enfin, l’évolution des conflits régionaux et ceci, plus particulièrement au Moyen-Orient, dans le Golfe et en Afrique. En conclusion, je me demanderai comment l’opinion publique française semble percevoir ces données de l’environnement international.
Les relations Est-Ouest
« L’URSS est l’empire du mal », un pays coupable de « crimes contre l’humanité ». Reagan est « l’héritier de Hitler, un menteur et un meurtrier ». Les joutes verbales entre les supergrands ont atteint, au cours des dernières années, une virulence inconnue depuis longtemps, et les rencontres entre Américains et Soviétiques se sont faites plus rares. Assistait-on, après la fin de la détente, au retour de la guerre froide ? L’Amérique de Reagan, confirmée dans son approche idéologique de l’URSS par le comportement de cette dernière, et les dirigeants du Kremlin découragés par l’attitude de l’administration Reagan semblaient résignés à n’échanger l’un avec l’autre que le maximum d’imprécations et le minimum de contacts. Les États-Unis donnaient l’impression de vouloir changer le système soviétique au moment où les Soviétiques se contentaient d’espérer que l’Amérique changerait de président. Cette vision monolithique d’un durcissement inexorable est peu compatible néanmoins avec la reprise timide d’un dialogue qui semble s’amorcer et être confirmé par une modération nouvelle du langage. Ce n’est point le retour à la détente, mais c’est peut-être le début d’un dégel imposé par le réalisme et la nécessité devant laquelle les deux grands se trouvent de dialoguer l’un avec l’autre. Le système international, que Raymond Aron avait défini, au début des années cinquante, sous le double vocable de « guerre improbable, paix impossible », continue de s’imposer. Les termes de guerre froide et de détente, loin de devoir être radicalement opposés, apparaissent comme deux variables extrêmes d’un même schéma conceptuel.
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