Dans la seconde partie de son article, l'auteur fait le bilan catastrophique de la politique économique menée en Birmanie depuis plusieurs décennies, et il insiste sur les contradictions d'une politique générale qui se veut autarcique mais ne peut se passer de l'aide extérieure, financière, intellectuelle et technologique.
Birmanie : par-delà le rideau de bambou (II)
La situation politique et militaire en Birmanie ne peut, on s’en doute, que provoquer des distorsions sérieuses pour l’économie. Il n’est que de lire les comptes du budget 1983-1984 pour comprendre que les belles déclarations officielles pour le bien-être social ne sont que fadaises. Sur vingt-deux postes budgétaires, trois totalisent 58 % des finances : la Défense nationale (25 % directement mais entre 30 et 35 % indirectement), l’Agriculture avec 18 % et 15 % pour l’Éducation. Quant à ce qui nécessiterait une action urgente, à savoir : la santé et la « sécurité sociale », ils ne reçoivent que 8 et 0,50 % du budget (1).
Mais au-delà d’une analyse savante de l’économie, l’activité productrice peut se résumer à deux éléments : le riz et le pétrole. Pour ce qui concerne le premier, la production pour l’année 1983-1984 fut de 14,1 millions de tonnes (2) qui représentent 44 % des exportations et occupent 70 % de la population (3). C’est très officiellement au début du mois d’avril 1976 que la Birmanie obliqua économiquement. Le ministre birman des Finances et du Plan, U Win, monta à la tribune du 5e Congrès du peuple juste avant l’ouverture de la session budgétaire pour annoncer « un vaste ensemble de réformes en vue de placer dorénavant l’économie socialiste… dans le cadre d’une stricte rentabilité commerciale. À compter du 1er avril (date du début de l’exercice fiscal) toutes les entreprises industrielles et commerciales du secteur public devront être exploitées de manière à faire des profits » (4). Bien que toujours officiellement socialiste, le pays n’en possède pas moins une économie agricole à caractère privé. Plus des quatre cinquièmes de la production de riz proviennent des paysans indépendants. Ceux-ci, s’ils doivent vendre de 20 à 60 % de leur récolte à la coopérative gouvernementale, arrivent à conserver pour eux le riz de la meilleure qualité dont une partie sera vendue à grand profit au marché noir florissant. Le problème pour le gouvernement est qu’il bénéficie d’une production trop importante par rapport à ses capacités de stockage.
Si l’an dernier l’excédent de riz était de près d’un million de tonnes, les entrepôts ne pouvaient recevoir que 45 % des achats gouvernementaux. L’insuffisance des silos conduit les Birmans à stocker de façon insensée : l’empilage des sacs sur de trop grandes hauteurs provoque la destruction des couches inférieures par la chaleur ainsi créée. De plus, la baisse des cours internationaux du riz — de 365 dollars américains la tonne en juin 1981 à environ 250 dollars en septembre dernier — est durement ressentie et conduit à un stockage accru en attendant de meilleurs auspices.
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