Politique et diplomatie - L'Europe en viager ?
Parce que Mme Gorbatchev a visité nos couturiers, irions-nous croire que la diplomatie soviétique se gante à Paris ? Qu’elle n’affecte plus les manières brutales du temps où M. Khrouchtchev se déchaussait à l’ONU suffirait-il à nous abuser ? Ses détours actuels impliquent-ils un changement d’orientation, un infléchissement du dogme ? Fontenelle n’avait pas attendu d’être centenaire pour nous mettre en garde : « l’équivoque sert de prétexte aux intérêts et aux passions ».
Lors de sa visite à Paris, nous avons donc volontiers écouté M. Gorbatchev pour savoir ce qu’il pense et non ce qu’il convient de penser. Certes, dans ses propos officiels la diplomatie a son langage de convenance et, peut-être, sommes-nous trop imbus du préjugé que le dialogue ne peut que favoriser l’entente. Deux bonnes raisons pour être dupes. Mais le cœur d’un peuple est beaucoup plus subtil que ne peut le donner à croire le pouvoir des médias, même si les lieux communs, une tare en littérature, sont une force en politique. L’opinion publique, en France, ne s’en est donc pas laissé conter. Elle se montrait irritée du peu de cas que fait l’Union Soviétique de conférences comme celle d’Helsinki, où les hommes essaient de guérir leur mal commun. Il lui paraissait vain de répondre aux réalités par des mots.
Et pourtant le numéro Un soviétique n’a pas hésité à jouer le jeu des médias à la manière occidentale : interview à la télévision, conférence de presse ! Mieux encore ces prestations publiques ont eu le privilège d’être diffusées par la télévision soviétique à la stupéfaction de son auditoire. À chaque fois M. Gorbatchev a su pratiquer avec habileté l’art de l’esquive, mais l’observateur attentif a pu se rendre compte qu’une profonde énergie lui tenait lieu de discipline diplomatique.
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