Après avoir traité « L'Algérie et l'islam » en mai 1987, l'auteur aborde maintenant « L'islam en Tunisie », sujet d'autant plus intéressant qu'un récent procès a fait quelque bruit au sein d'une information pourtant riche. Il nous présente ici une analyse très approfondie de la situation politico-religieuse de ce pays ami.
L'islam en Tunisie
D’aucuns, en Europe, ont pu s’étonner que l’agitation fondamentale islamique se soit, depuis quelques années, étendue à la si paisible Tunisie, et ce au point d’y apparaître, aux yeux des dirigeants de ce pays, comme un dangereux complot contre la sûreté de l’État, et d’y donner lieu à un retentissant procès.
Certes, nul n’ignore que l’islam constitue un élément majeur de la personnalité collective tunisienne. Mais l’évolution sociale et culturelle, très avancée dans son ensemble, du peuple tunisien, et l’esprit moderne de ses élites et de ses dirigeants, semblaient à nombre d’observateurs devoir préserver ce pays des inquiétudes et des troubles suscités, en d’autres points du monde musulman, par le zèle islamiste. C’était là sous-estimer, cependant, les diversités internes de la société tunisienne, les répercussions des difficultés économiques et sociales subies par le pays, le possible retentissement d’une propagande parée du prestige de maîtres islamistes orientaux.
Le peuple tunisien, dans son ensemble, apparaît profondément attaché à l’islam, qui est sa foi ancestrale, le fondement de sa morale, la base de sa culture, le ressort de sa sensibilité. Aux yeux d’un observateur de l’extérieur, l’attitude du peuple tunisien à l’égard de la religion musulmane n’est pas sans rappeler, dans une certaine mesure, celle du peuple italien à l’égard du catholicisme. L’atmosphère tunisienne est naturellement religieuse sans surenchère ni provocation. Les lieux de culte sont nombreux, et fréquentés assidûment. L’attestation publique du sentiment religieux est habituelle. La piété populaire se nourrit de pratiques traditionnelles et surérogatoires, qui suscitent le scepticisme et la critique d’esprits avancés, mais restent habituellement suivies même par la jeunesse. Et parmi les personnalités plus spécialement liées à la religion, prédicateurs, desservants, agents du culte, enseignants, on trouve toute une gamme d’esprits, des plus traditionalistes aux plus hardis.
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