L'auteur est sénateur représentant les Français établis hors de France. Diplômé de HEC et de Harvard Business School, ancien président de Saint-Gobain Vitrage, il a effectué de longs séjours à l'étranger, en particulier aux États-Unis. Au moment où ceux-ci se trouvent en pleine campagne présidentielle, il nous brosse un bilan des investitures Reagan, fait quelques comparaisons avec l'Europe et la France, hasarde quelques prévisions.
Les États-Unis de Reagan
Après un rappel de l’identité américaine, il paraît souhaitable, à ce stade de la campagne électorale des États-Unis, d’esquisser un bilan des actions menées par le président Reagan avant de s’interroger sur l’originalité et peut-être même l’exemple à retenir des solutions choisies par ce pays. À Washington, comme dans le monde entier, le débat porte sur le déclin des grandes puissances : peut-on s’exprimer à leur sujet en termes « d’ascension et de chute », comme si les pays étaient les uns après les autres engagés dans une grande course de relais dont les vainqueurs changeraient périodiquement ?
Pour certains historiens, le vieillissement et le dépassement guettent les nations comme les hommes. Ce destin inéluctable peut-il ou non se lire dans les lignes de la main de l’histoire ? Faut-il croire, pour les États-Unis, ce pays ami, à cette prévision de cartomancienne ?
L’identité américaine
Jean Baudrillard affirme que « les nuages nous gâchent le ciel en Europe : nous avons de petits ciels pommelés à l’image de nos pensées ». Il nous manque la vision de l’espace. Entre les Américains et nous, existe une différence ; ils sont un continent, et nous nous dissimulons derrière des haies, des enclos, parfois des murs. Le confidentiel, le chuchotement, le secret-défense font partie de notre décor, en contraste avec l’idée de frontière, du toujours plus loin et de la confiance en soi sans réserve, exprimée par un sourire immunitaire, publicitaire, en passe de devenir principe de gouvernement. L’espace s’étend bien au-delà de la géographie, les comportements intègrent le spatial, la certitude d’une nouvelle aurore, l’esprit d’entreprise. Les mentalités n’acceptent pas de voir s’installer la nuit, le repos, ni de voir ralentir le progrès technique. Tout doit fonctionner en permanence. Crise de l’énergie ou non, l’électricité ne doit pas s’éteindre ; la modernité exige de la lumière, d’où cette impression de gaspillage continuel dans un monde en mouvement, toujours renouvelé. Pas une seconde d’arrêt pour compter furtivement les billets sous l’oreiller, l’argent se veut fluide, convoité, brownien. Il exprime le temps d’un succès un signe distinctif affirmé, envié, toujours remis en circulation, par opposition au patrimoine établi transmissible à travers les siècles.
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