Politique et diplomatie - Dans le cortège de 1789
Plutôt que de commémorer la Révolution nous préférons en célébrer le bicentenaire. Le faste qu’on y met est sans doute à la mesure de l’événement mais convient-il de le réduire à des images d’Épinal ? L’illusion lyrique qu’il communiqua à tant de ses acteurs peut-elle encore nous animer ? Péguy notait, il y a bien longtemps, que la mystique républicaine s’était évanouie sous l’effet du socialisme scientifique ou purement politicien. Reste que l’orage révolutionnaire a changé nos modes de pensée.
Les révolutions ont ceci de fascinant qu’elles suspendent les lois et abolissent toute transcendance. Elles exaltent en l’homme le sentiment de sa propre existence, le livrant alors à sa subjectivité ou le laissant libre de se complaire dans le rêve de nouvelles attaches qui ne soient plus celles de l’obéissance. C’est ce qu’exprime Victor Hugo dans « Les Misérables » en nous assurant que « le sens révolutionnaire est un sens moral ».
La France, seul pays à avoir connu une telle insurrection contre le passé, peut-elle s’en prévaloir au point de considérer que les autres nations seraient restées en marge du courant de liberté qu’insufflait la Déclaration des droits de l’homme ? L’Angleterre n’avait-elle pas sa Grande Charte depuis 1215 ? Et si son importance constitutionnelle n’est pas à la hauteur du mythe qu’elle engendra, sa résonance est toujours restée intacte ; on peut même la considérer comme le type idéal de contrat social. Notre Déclaration des droits de l’homme s’est substituée au décalogue et a instauré, pour la première fois dans l’histoire, une société sans archétype ni principe de légitimité, bref une société de libre association où le sacré était banni. Or, comme le notait dans ses cahiers la jeune philosophe Simone Weil : « Il n’y a que par l’entrée dans le transcendant, le surnaturel, le spirituel authentique que l’homme devient supérieur au social ».
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