En cette fin du XXe siècle, il est manifeste que la politique d'expansion de l'URSS en Afrique a fait faillite : tous les États qui se sont modelés conformément à la doctrine marxiste-léniniste se trouvent dans une situation dramatique. M. Gorbatchev l'a bien compris : déjà préoccupé par ses graves difficultés intérieures, il semble se désengager du continent africain tout en tentant d'y gérer certains acquis stratégiques et économiques.
L'évolution de la politique de l'URSS en Afrique
La pénétration importante de l’URSS et de ses alliés en Afrique pendant la période brejnévienne a profondément perturbé l’équilibre géopolitique de cette zone. Elle a donné à certains affrontements locaux une dimension internationale. L’expansionnisme soviétique a cependant trouvé ses limites au milieu des années 80 en raison des résultats économiques désastreux enregistrés par les protégés de Moscou et de l’enlisement des conflits dans lesquels l’URSS s’était engagée indirectement. Sous l’impulsion de M. Gorbatchev, celle-ci a donc été contrainte d’adopter une stratégie moins coûteuse basée sur le pragmatisme et la négociation. L’évolution de cette attitude a créé une certaine dynamique qui est en train de modifier le paysage politique du continent africain. Elle laisse apparaître cependant de nombreuses incertitudes tenant à la fois au devenir de l’Afrique et au développement de la situation interne en URSS.
Les raisons de l’engagement soviétique en Afrique
Les raisons qui ont motivé l’action de l’URSS dans cette partie du monde sont d’ordre stratégique, économique et politique.
À l’époque de la grande rivalité Est-Ouest, l’Union Soviétique de Brejnev a manifesté un vif intérêt pour les grandes routes maritimes qui revêtent une importance stratégique. Son grand dessein, pendant cette période, a été défini par l’amiral Gorchkov, qui demeure le grand artisan de la puissance de la flotte de l’URSS : « Couper les lignes de communication océaniques et les artères qui alimentent le potentiel militaire et économique des pays impérialistes agressifs continue d’être une mission de notre marine de guerre » (1). Sur cette question, il convient ici de rappeler le caractère asymétrique qui a façonné les structures des marines occidentales et soviétique : les États-Unis et leurs alliés sont très dépendants de leurs lignes de communication maritimes pour une grande partie des approvisionnements vitaux, alors que l’URSS n’a pas ce même genre de préoccupation pour se ravitailler en produits pétroliers et en minerais. Les missions des deux flottes reposent donc à la base sur deux concepts opposés : la marine américaine doit s’efforcer de maintenir ouvertes les lignes de communication (théorie du « Sea control ») ; la marine soviétique, pour sa part, n’a pas à protéger dans une certaine mesure les voies de navigation, mais à couper celles de son adversaire (théorie du « Sea déniai »). C’est dans ce but qu’elle a cherché à occuper des positions clés, d’une part le long des côtes de l’Afrique australe (Angola, Mozambique) pour contrôler la route du Cap par où sont passés jusqu’à plus de 50 % des fournitures pétrolières de l’Occident, d’autre part le long de la mer Rouge (Éthiopie), zone présentant une importance majeure en raison de la proximité du canal de Suez.
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