Après avoir brossé un tableau de l'évolution du monde, l'auteur propose la création d'une « entente atlantique » dont les attributions se situeraient à la fois dans les domaines militaire et économique. Dans celle-ci, il montre le rôle éminent que notre pays doit jouer : nos capacités le permettent, notre devoir l'impose.
Évolution et défense
Le demi-siècle qui s’achève a prouvé à maintes reprises que rien n’est plus hasardeux que la prévision. Paul Valéry l’avait remarqué lorsque, philosophant sur l’histoire et s’appuyant sur l’exemple de la Grande Guerre, il écrivait : « Rien n’a plus été ruiné par la dernière guerre que la prétention de prévoir ». « Prétention » : dans ce seul mot il avait réuni tout ce que comportait d’aléas majeurs, et par conséquent de vanité intellectuelle, la tentation de considérer comme assurés des événements futurs toujours hypothétiques.
Un demi-siècle plus tard, le besoin de prévoir a pris une telle importance qu’une science lui est consacrée. Des organismes spécialisés, publics ou privés, riches d’hommes de valeur et dotés de moyens techniques des plus évolués, ont vu le jour. Une renommée s’est établie autour de leurs noms. Mais leurs limites sont devenues évidentes et leurs échecs ont été voyants, qu’il se soit agi de l’alerte boursière d’octobre 1987 ou de l’évolution politique de l’Europe centrale et orientale récemment.
Et pourtant… Quel homme investi de responsabilités importantes pourrait, et oserait, se dispenser d’essayer de prévoir l’avenir qui l’intéresse ? Dans le domaine de la défense, le coût et la durée des programmes d’armement et des politiques de personnels imposent une vision à très long terme dont les perspectives se mesurent en décennies : dix années de développement pour les armements majeurs, suivies de vingt années de mise en œuvre opérationnelle par des hommes qui auront été recrutés pour passer trente années sous l’uniforme. Il suffit de se livrer à l’exercice passionnant qui consiste à revoir les événements survenus au cours des dix, vingt et trente années écoulées pour saisir toute la difficulté d’une tâche liée à l’instabilité chronique de notre monde.
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