Débats
• On a parlé d’un nouvel ordre mondial du pétrole et il a même été question d’une réglementation plus stricte, avec la possibilité d’une coopération entre l’Opep et l’AIE. Qu’en est-il ?
Les forces politiques et économiques ne paraissent pas antagonistes entre pays producteurs et consommateurs actuellement. Il y aurait donc sur le plan des intérêts un certain consensus intellectuel. Mais de là à gérer le marché…
• Quel est l’impact de l’islam sur le conflit du Golfe, et surtout quel sera celui du conflit sur l’islam ?
L’islam, comme les autres religions, a la vie dure. Il a traversé d’autres conflits de tous ordres. Son impact sur la guerre a été faible et il a été exagéré de parler de guerre sainte. Quant à évoquer les islamistes, il faut bien voir qu’il s’agit d’un mouvement politique visant à mettre en œuvre certains principes tirés du Coran pour une pseudo-adaptation au monde moderne. C’est un mouvement de type fascisant et non de type réactionnaire ou rétrograde comme on le pense souvent. Il est possible que l’islamisme tire quelque profit de l’effondrement de l’État nation et même du socialisme spécifique du Baas en Irak. Ce ne sera pas au profit de l’idéologie du progrès et même de l'occidentalisme dans les pays arabes en général.
• L’histoire moderne du monde arabe commence avec la Première Guerre mondiale. C’est à cette époque que celui-ci a ressenti les injustices dont il était victime. Il y eut ensuite 1948, 1967, 1976, 1982 et 1991. Dans la conscience des masses arabes, il y a toujours la même question : la paix serait-elle impossible ? D’où les deux courants qui sillonnent le monde arabe, celui de la revanche et celui de la négociation. Les intellectuels arabes laïcs ont connu la pensée occidentale par le marxisme et le libéralisme. La chute du marxisme et l’influence des médias au cours du dernier conflit ont provoqué un manque de confiance. C’est pourquoi le seul discours valable dans les pays arabes est le discours islamique, intégriste et non les voix laïques. Les intellectuels laïcs sont considérés comme des soutiens de la colonisation : alors que faire ?
• Les pays de la région du Golfe ont tous, à des degrés divers, fait appel à une main-d’œuvre immigrée d’origines diverses. Cela constitue incontestablement un facteur d’insécurité et on ne peut en négliger l’importance.
Il est en effet frappant qu’en Arabie Séoudite même les bergers ne soient plus Séoudiens, mais Égyptiens ou Yéménites. Au Koweït, la population d’origine ne dépasse pas le tiers des habitants. En Irak, la reconstruction a appelé une main-d’œuvre étrangère considérable.
• Durant cette crise, l’Europe occidentale n’a pas été très présente et il convient, pour la France, de repenser certains dossiers : lesquels ?
Ce n’est probablement pas le sujet du débat, et de plus il ne faudrait pas intervenir dans des domaines traités aux niveaux des gouvernements et des états-majors. Pour ne pas se dérober à la question, il convient de revenir sur ce concept du « stratomonde ». À l’heure actuelle, un pays a une stratégie mondiale, sinon il deviendra à plus ou moins bref délai un pion. Il faut donc étudier les données de cette stratégie mondiale. Nous ne pouvons le faire ici, mais il est un facteur qu’on ne peut oublier : la démographie. Elle va rester galopante et nous allons passer à 6 milliards d’habitants, puis à 8 et à 12 milliards. De plus, je ne crois pas que l’histoire du monde soit la lutte des nations de mer contre les nations de terre, je pense qu’elle se caractérise par la sédentarisation progressive des peuples nomades, et nous y arrivons. À partir de ce moment-là, les espaces de mobilité pour faire jouer les intérêts, les communications, les rencontres des sociétés, deviendront océanospatiaux, car il n’y a plus que dans ces deux espaces — spatial et maritime — que l’on est mobile. D’où l’exigence de savoir et déterminer où nous devons faire porter notre effort. De toute manière, j’ai horreur des expressions « l’ordre mondial », « l’ordre international » ; je me méfie toujours de l’ordre, surtout s’il est mâtiné d’ordre militaire ! Ce qui permet la vie, c’est un minimum de désordre créatif ; le monde a un bruit de fond et ce que nous devons détecter, c’est à quel moment et où apparaît un signe d’ordre, un signal qui ne nous plaît pas ou qui va contre nos intérêts. Alors de deux choses l’une : ou nous prenons le monde dans son ensemble et nous serons l’un des acteurs du stratomonde, ou nous pensons n’avoir qu’une politique régionale et nous ne serons plus un acteur.
• Pourquoi l’islamisme est-il un fascisme et non un « droitisme » ?
Beaucoup ont tendance à considérer que l’islamisme, ou ce qu’on appelle de manière fort impropre l’intégrisme, est simplement un islam droitier, réactionnaire, regardant vers le passé. Il l’est effectivement par certains aspects mineurs. C’est oublier qu’il se veut une solution à usage moderne. Il considère qu’il correspond mieux que la démocratie aux besoins de l’homme moderne. Il se pose en rival des démocraties et des républiques. Il fait en quelque sorte ce que le fascisme prétendait faire en s’érigeant en rival de ce qu’avaient apporté la Révolution française et les révolutions consécutives, en édifiant un national-socialisme ; un mouvement plébéien certes, mais profondément différent de l’inspiration démocratique.
• Comment les pays arabes qui deviennent islamistes considèrent-ils le pétrole ? Représente-t-il à leurs yeux une simple ressource économique ou en font-ils une arme ?
Les Arabes ont d’abord considéré le pétrole comme une aubaine de plus : Allah, qui leur avait donné la révélation et la langue arabe, leur donnait par surcroît le pétrole. Les Koweïtiens, qui ont le sens du commerce, ont commencé la mise en valeur des gisements ; le même tournant s’est produit du temps du roi Fayçal en Arabie, succédant à une période de dissipation qui avait failli mettre le pays en état de cessation de paiement. Le pétrole devenait pour les Arabes un moyen d’équipement, ce qui n’élimine pas entièrement la dissipation, car il faudrait savoir dans quelles proportions se répartissent les revenus entre le Trésor et la cassette personnelle de l’émir. Quoi qu’il en soit, l’intérêt du Koweït est en train de se déplacer du Koweït lui-même vers les places financières étrangères. Il convient de tenir compte des deux courants qui se partagent le monde arabe : un courant revanchard et un autre favorable au compromis. Le pétrole s’inscrit dans ces tendances. Il est une arme, évidemment, et il a parfois été utilisé avec un esprit de revanche ; dans ce cas, il y a automatiquement conflit d’intérêts entre l’Occident et les Arabes. Si les producteurs empruntent la voie du compromis, le pétrole peut alors être un moyen d’assurer raisonnablement le développement de l’Occident et des pays exportateurs.
• Dans la mesure où la démocratie est souhaitable, car elle est moins polémogène que les régimes autoritaires, l’islam y fait-il obstacle et a-t-il des difficultés à s’y adapter ?
L’islam, comme toute religion, est anthropologique, c’est-à-dire qu’il est pour la plénitude de l’homme, y compris par la voie démocratique. Bien entendu, il est théocentrique, mais il peut faire ce même tournant qu’a fait l’Église catholique en s’accommodant de la démocratie. L’islam peut d’ailleurs retrouver cette démocratie tribale, qui est réelle dans la vie bédouine ; chose que les Soviétiques ont ignorée et c’est une des raisons de l’échec du marxisme en Asie centrale. Je pense qu’il serait bon que les musulmans démocrates ne se privent pas de l’appui de cette démocratie bédouine.
• Compte tenu des conditions actuelles, quelle politique étrangère la France doit-elle conduire ?
La réponse est simple : une politique d’intérêts. Lesquels ? Premièrement la liberté de circulation dans le Golfe ; nous avons l’obligation d’assurer nos approvisionnements et ceux de nos alliés, et il ne faut pas qu’en un endroit comme celui-là, il y ait des obstacles ou des restrictions. Deuxièmement, il n’est pas de notre intérêt qu’il y ait une hégémonie de nature à bouleverser les données existantes dans une région d’une telle importance. Ce serait attentatoire au droit des gens si on permettait aux forts de venir à bout des faibles en détruisant l’équilibre en place. Troisièmement, il faut veiller à assurer notre approvisionnement pétrolier ; alors doit-on engager des forces armées pour défendre de tels intérêts ? Incontestablement oui, puisqu’il s’agit d’intérêts collectifs. La France devrait être une référence, offrir une solution à des peuples qui se cherchent ; or pour l’instant, il est à craindre que le monopole américain soit fortement établi dans la région.
• Que pensez-vous de la candidature de la Turquie à la Communauté européenne compte tenu de son attitude au cours de la guerre du Golfe ? Par ailleurs, quand on parle du Golfe, quelles sont les parties prenantes et comment stabiliser la région ?
Les dirigeants turcs ont pensé que leur comportement dans cette crise leur vaudrait la reconnaissance de la Communauté européenne qui, dès lors, leur ouvrirait ses portes. L’attitude adoptée par Ankara était d’autant plus surprenante que l’opinion tout entière était contre la guerre. Toujours est-il que la Turquie fut aux côtés des Alliés, mais qu’elle en ait escompté l’adhésion à la CEE reste illusoire : la Communauté est une sorte de club avec ses règles et ses obligations, au regard desquelles la Turquie ne remplit pas les conditions exigées, sur le plan économique tout d’abord, mais aussi sur le plan politique. La solidarité de la Turquie reste appréciable, mais elle ne pouvait ni avancer ni retarder son entrée dans la Communauté.
Il ne faut pas enfermer la région dans des limites géopolitiques trop rigoureuses ; il y existe des foyers de troubles qui, de surcroît, sont liés entre eux. Par exemple, Israël et la question palestinienne : or la guerre a montré qu’Israël ne pouvait restreindre son champ de négociations à ses voisins directs ; tout règlement devra inclure l’Irak. On ne peut se contenter d’avoir rétabli la frontière entre ce dernier et le Koweït, il faut régler tous les problèmes de la région ; la grande question qui va être débattue est le concept de politique arabe. On a dit que celle du général de Gaulle était mythique, ce qui laisse présager une remise en cause de cette diplomatie. Sans doute au lieu de parler de politique arabe devra-t-on parler de régions géographiques. Il doit y avoir d’abord une politique méditerranéenne, ensuite une politique du Proche-Orient. Bref il est temps de ne plus tout envisager en fonction du fait arabe, il faut prendre en compte tous les paramètres.
• On travestit un peu la pensée du général de Gaulle en parlant d’une manière intrinsèque d’une politique arabe de sa part : il a eu une politique très équilibrée jusqu’en 1967. Au centre des problèmes de la région subsiste le conflit israélo-palestinien ; en ce domaine que peut proposer la France ?
La France a une partie à jouer. Elle est d’autant mieux placée pour le faire qu’elle a constamment tenu le même langage partout, ce qui n’a pas été le cas général. De plus, nous avons les atouts d’être au Conseil de sécurité, d’avoir été présents dans la région et d’en avoir l’expérience, mais, en outre, nous avons su sauvegarder des liens avec toutes les parties en cause. Il ne faudrait pas imaginer qu’une entente entre Arabes et Israéliens mettrait un terme à la crise, car il restera encore le problème de Jérusalem, ville sainte pour les Chrétiens, et seule la France peut en parler en raison d’un enracinement historique lointain, alors que les États-Unis ne sont pas habilités à le faire n’ayant pas les mêmes vues sur la question. La France peut donc appuyer une solution, mais c’est aux parties en cause à la trouver.
• Le Liban est sans doute un petit pays au regard des intérêts qui se jouent dans la région, mais il est plus important qu’il n’apparaît géographiquement ou démographiquement par le fait qu’il constitue un petit laboratoire de la démocratie comme de la coexistence islamo-chrétienne, et par extension un laboratoire de la convivialité intercommunautaire. Alors où est le droit, si le Liban n’est pas rétabli dans sa souveraineté et dans son indépendance ? N’est-ce pas dans l’intérêt de la France de promouvoir le rétablissement du Liban ?
Il est sûr que le Liban a longtemps été considéré comme un modèle, mais la réalité a-t-elle répondu aux espérances ? Nous avons notre mot à dire d’autant que si nous ne sommes pour rien dans la création du Koweït, nous sommes pour beaucoup dans celle du Liban. Il faut que les occupants étrangers s’en aillent, sans exception. On ne se bat plus, c’est déjà beaucoup, mais pour la restauration des libertés publiques, c’est aux Libanais à trouver des solutions.
• Quelles peuvent être les conséquences, pour l’avenir de l’Europe des Douze, de la crise du Golfe ?
L’Europe vit sous l’empire du fait accompli depuis de nombreux mois. Ou bien nous renforçons l’unité européenne, ou bien nous nous accommoderons d’une Europe à géométrie variable selon les sujets à traiter. Il ne faut pas compromettre l’acquis et veiller à ce qu’il n’y ait pas de discordances avec les Allemands.
• En invitant la France à ne tolérer aucune hégémonie au Proche-Orient, il s’agit de suivre l’exemple de la Grande-Bretagne dans son attitude vis-à-vis du continent. Quand on parle du rôle de la France en Méditerranée, alors que d’autres sont plus puissants que nous, ne conviendrait-il pas que la France définisse de grands ensembles ? Mais ce rôle, que nous devons jouer, n’est-il pas incompatible avec un système de confusion, au sens juridique du terme, ayant pour résultat de faire disparaître l’originalité et la spécificité d’une politique française dans ce qu’on nommerait une politique commune ? Je vise ce qu’on appelle l’Europe politique. La mode est de parler d’États continents, de grands ensembles ; c’est une voie, mais il en est une autre, celle des Nations unies qui n’est en réalité qu’une organisation de nations, lesquelles y trouvent la possibilité de s’exprimer sans tomber dans l’isolationnisme ou l’oubli d’elles-mêmes.
• Dès le 6 août, les États-Unis ont déployé une armada aérienne considérable en Arabie, mais aussi en Turquie : est-il vrai que des Awacs et des F-111 ont été basés en Turquie dès le début ? Il a été fait mention de contrats d’armements de 33 milliards de dollars que les États-Unis se prépareraient à passer avec les pays de la région : quelle est la crédibilité de ce genre de nouvelles ?
Peut-être y a-t-il désinformation, mais on sait que l’Arabie Séoudite souhaite conserver le matériel déployé sur place par les forces américaines. Quant à la somme indiquée, il est impossible d’en vérifier la véracité. En ce qui concerne les appareils qui auraient été basés en Turquie au mois d’août, il y a lieu de penser que c’est vrai. Cela n’avait d’ailleurs rien d’illégal.
• Le principe d’intangibilité des frontières peut-il être encore maintenu dans le Golfe ?
S’il n’était pas maintenu, ce serait à désespérer de tout. En ce qui concerne l’Irak et l’Iran, il serait cependant souhaitable qu’intervienne un accord pour délimiter les frontières dans le Chatt al-Arab. Mais on ne peut envisager de dépecer l’Irak.
• La Jordanie, dont on n’a pas parlé, ne risque-t-elle pas de faire les frais d’un découpage, avec le problème palestinien, ou d’un changement de régime ?
Le roi Hussein a eu beaucoup de mal, mais il a su sauvegarder son trône en maintenant ses alliances traditionnelles et en tenant compte de l’opinion de son pays. Quant à un découpage de la Jordanie, qui serait à même de l’effectuer ? Certes, les Palestiniens souhaitent s’étendre si leur État voit jamais le jour, mais ils ne souhaitent pas dépecer la Jordanie.
• Les États-Unis envisagent-ils d’assurer longtemps une présence militaire dans cette région ? Et dans l’affirmative, cela n’offrirait-il pas à Israël une meilleure garantie que celle de l’ONU ?
La présence militaire américaine n’est pas très bien acceptée, ni par les gouvernements, ni par les populations. La télévision a d’ailleurs pris garde de ne pas présenter d’images où figuraient des soldats américains. Pour ce qui est d’Israël, ce pays n’a jamais compté que sur ses propres forces ; il affiche une totale méfiance envers tous les États, même amis. Au demeurant, Israël a-t-il besoin d’une protection ? C’est la première puissance militaire de la région. Le grand problème est d’ordre idéologique, et M. Shamir a nettement fait savoir qu’il n’était pas question de céder un centimètre carré à qui que ce soit.
La question est sans doute de savoir si la situation dans la région peut conduire l’Administration américaine à devoir maintenir une présence militaire dans la région. Plusieurs régimes se sont impliqués totalement dans la coalition ; ils se trouvent devant des risques de réaction de la part de ceux qui étaient hostiles à cette guerre et il devient fondamental pour les États-Unis d’assurer les positions sur lesquelles ils se sont appuyés. Alors, ne seront-ils pas conduits à décider de leur maintien sur place ?
• En Jordanie, le poids de la population palestinienne est tel et les institutions ayant un caractère assez démocratique avec des élections, qu’on peut se demander si ce qu’on a appelé l’option jordanienne ne se pose pas en termes nouveaux ; autrement dit, n’est-il pas plus envisageable aujourd’hui de résoudre la question palestinienne en relation avec le destin de la Jordanie ?
C’est possible, à condition que la politique du gouvernement israélien se modifie de manière radicale.
• Peut-on parler d’une esquisse d’alliance entre l’Iran et l’URSS, et l’Iran pourrait-il devenir un allié sûr de Moscou dans la région ?
Certes, l’URSS cherche des alliés, l’Iran aussi, mais on ne trouve jamais des alliés que contre des ennemis. Pour l’heure, on assiste à une suite d’esquives, car l’Iran veille à ce qu’il n’y ait pas de porosité à ses frontières avec les Arabes.
• Les ambassadeurs turcs en Europe et notamment à l’Otan ne cessaient-ils pas d’affirmer que l’occasion était propice à la création d’un Kurdistan en Irak ?
Les Kurdes sont mieux organisés en Irak qu’en Iran et en Syrie. Les Kurdes iraniens sont massés à la frontière irakienne, ce qui présente des difficultés ; quant aux Kurdes de Syrie, ils sont très minoritaires, ne jouissent pas de leurs droits et ne revendiquent aucune autonomie. Le cas des Kurdes irakiens est donc très particulier, ne serait-ce que parce qu’ils ont pris les armes depuis plus de trente ans ; malgré cela, ils ont toujours entretenu des relations avec les partis non kurdes d’Irak, se mêlant ainsi à l’ensemble de la population.
Quant à la position de la Turquie, il faut savoir qu’au départ les Turcs étaient hostiles à toute forme d’autonomie des Kurdes d’Irak. Les choses ont changé avec le président actuel, qui a d’ailleurs une grand-mère kurde et qui a une conception presque ottomane de l’État. L’Empire ottoman regroupait des populations de races et de religions différentes, lesquelles vivaient en parfaite intelligence, jusqu’à l’apparition du nationalisme au XIXe siècle. Le président Ozal est marqué par ce système ottoman. De plus, il a vécu de nombreuses années aux États-Unis et il a été sensible au « melting-pot » américain. En d’autres termes, il ne considère pas qu’une forme d’autonomie kurde pourrait menacer l’unité de la Turquie, ni celle de l’Irak. Récemment, il a fermement déclaré que son pays ne tolérerait pas la création d’un État kurde en Irak et qu’alors son armée interviendrait ; puis, après la création du Front d’opposition irakien, il a estimé que la solution était l’instauration d’un système fédéral en Irak comprenant une entité kurde autonome. D’où les entretiens secrets à Ankara entre responsables turcs et deux dirigeants du mouvement historique kurde irakien. Un accord serait intervenu sur la base d’un fédéralisme. Pour le président Ozal, il est évident que la Turquie ne peut avoir une influence en Irak que par les mouvements kurdes. ♦