Après 27 ans de pouvoir personnel, le président zambien Kenneth Kaunda a laissé un pays ruiné. La période d’alternance qui a débuté à l’automne 1991 n’a pas vu d’amélioration de la situation économique. L’avenir de cette nation enclavée au sein de l’Afrique australe pourrait bien être lié à celui de la république d’Afrique du Sud qui joue de plus en plus le rôle de « locomotive économique » dans la région. L'auteur analyse cette situation.
Illusions perdues en Zambie ?
Après plus d’un quart de siècle de pouvoir sans partage de Kenneth Kaunda, la Zambie est entrée dans un processus démocratique en abandonnant le régime de parti unique et en portant, par la voie des urnes, Frederick Chiluba à la fonction suprême en 1991. Deux ans après cette mutation, le pays est toujours dans le marasme. Cette nation, qui possède des richesses minières et agricoles importantes, semble avoir encore manqué un rendez-vous de l’histoire. Dans son passé, cet État de l’Afrique australe a en effet connu de nombreuses désillusions qui ont entravé son développement. Son accession à l’indépendance s’était pourtant défoulée dans de bonnes conditions après une longue lutte pacifique des nationalistes locaux.
Le long combat du père fondateur de la Zambie
Le territoire qui forme la Zambie était divisé en un nombre considérable de tribus quand la Grande-Bretagne s’y intéressa. Après les explorations de Livingstone dans le haut Zambèze, Cecil Rhodes, homme d’affaires, administrateur colonial et agent actif de l’expansionnisme britannique en Afrique australe fonda en 1895 la « British South Africa chartered company » (BSACC). Cette puissante société était chargée de l’exploitation des mines dans la région. Elle administra la zone qui devait recevoir en 1911 le nom de Rhodésie du Nord et devenir un protectorat britannique en 1924. Pour préserver ses intérêts, Londres imposa en 1953 la création de la fédération d’Afrique centrale englobant les deux Rhodésies (Nord et Sud) et le Nyassaland (futur Malawi). Cet événement engendra un large mouvement de protestation qui permit aux nationalistes africains d’occuper le devant de la scène ; parmi ceux-ci, Kenneth Kaunda.
Fils d’un pasteur, le futur chef de l’État zambien commence une carrière d’instituteur dans l’école missionnaire de son enfance à Chinsali. Muté dans le Copperbelt, il est alors confronté aux durs conflits sociaux de la ceinture cuprifère et se lance dans la politique. C’est ainsi qu’il rejoint en 1948 le Congrès national africain, un mouvement dirigé par Harry Nkumbula et luttant pour l’égalité raciale dans le pays. Le fougueux militant devient ensuite l’un des leaders les plus dynamiques dans le combat contre la fédération instituée par les Britanniques. Emprisonné à deux reprises (deux mois en 1955, puis neuf mois en 1959), il se pare d’une stature de héros régional. Galvanisé par une audience croissante au sein de la population noire, il fonde en 1960 l’Unip (United National Independence Party). Élu député au conseil législatif en 1962, il remporte à la tête de son parti les élections suivantes et devient ainsi à quarante ans le plus jeune Premier ministre du Commonwealth le 22 janvier 1964. À ce titre, il conduit la Rhodésie du Nord à l’indépendance, le 24 octobre 1964, sous l’appellation de Zambie (la fédération d’Afrique centrale avait éclaté à la fin de l’année 1963). Kenneth Kaunda en est le premier président. Toujours candidat unique à sa propre succession, il sera réélu cinq fois à la tête de l’État jusqu’à la fin des années 80.
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