Après la publication dans notre livraison de décembre 1993 de réflexions sur le Livre blanc de la Défense, voici un premier article dont l'auteur, inspecteur de la Défense opérationnelle du territoire (IDOT), s’est déjà exprimé dans notre livraison d’août-septembre 1993.
Le recours aux armées, composante de la force publique
Les changements intervenus récemment dans le contexte géostratégique, la réduction du format des armées qu’ils ont entraînée ont fait surgir une question à laquelle sont apportées des réponses contradictoires : il s’agit de savoir si l’implantation des unités de l’armée de terre a pour objet unique de faciliter son déploiement opérationnel, la montée en puissance et la projection de ses forces, ou si elle est aussi la conséquence d’une mission reconnue à cette armée sur le territoire ; en d’autres termes, si les armées, particulièrement l’armée de terre, doivent contribuer sur le territoire national aux missions de défense civile qui visent à assurer la sécurité des personnes, des biens et de l’environnement et à garantir la continuité de l’action gouvernementale, ou si leur vocation est exclusivement de défense militaire.
Les réponses apportées à cette question se fondent très souvent sur un examen incomplet du problème, quand ce n’est pas sur un a priori doctrinal, et les exemples étrangers cités à l’appui des différentes thèses ne sont pas toujours pertinents. C’est qu’en dépit de l’ordonnance du 7 janvier 1959, la défense continue trop souvent d’être perçue comme essentiellement militaire et la réflexion se porte plus facilement vers l’emploi des armées dans le cadre d’un conflit ouvert, voire d’une crise internationale, que vers le dosage délicat que le gouvernement peut faire dans l’usage de la force publique.
Il y a pourtant là, à mon sens, un problème fondamental qu’il convient d’examiner sereinement. La tradition républicaine, une gestion économe des deniers de l’État, la nécessité d’entretenir l’esprit de défense et de garantir au mieux les libertés publiques commandent d’affirmer l’unicité de la force publique. Dans une telle optique, on ne peut se résoudre à considérer les armées comme un corps expéditionnaire, ayant sur le territoire national sa base arrière, ce qui transparaît parfois dans certaines prises de position.
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