Rôle et emploi des armes de précision
Parmi toutes les améliorations apportées aux armes conventionnelles au cours des dernières décennies, celle de la précision est probablement la plus remarquable. En donnant à des systèmes d’armes la capacité d’obtenir d’emblée l’effet recherché, on élargit considérablement leur champ d’emploi et on leur permet de jouer un rôle accru — voire décisif — tout au long des différentes étapes d’un engagement militaire. Limité jusqu’à maintenant au domaine tactique, l’emploi des armes de précision pourrait donc s’étendre, au cours des années à venir, aux frontières du stratégique, et notamment dans la gestion de crises telles que nous les connaissons déjà aujourd’hui.
Efficacité opérationnelle et contraintes techniques
Les développements technologiques intervenus depuis la Seconde Guerre mondiale dans les capteurs, l’électronique, les transmissions, ont permis l’avènement de toute une variété d’armes capables, dans des milieux divers, à des distances de plus en plus grandes, de se guider inéluctablement vers leurs cibles. Intégrés à des systèmes d’armes appropriés leur fournissant l’environnement opérationnel et technique nécessaire à la détection, à la poursuite, au guidage en vol et au déclenchement de leur charge militaire, missiles, torpilles autoguidées, mines intelligentes sont venus enrichir, en la concurrençant, la panoplie des bombes et projectiles à vol balistique. Certes, la révolution fut progressive car ces armements dépendaient de la mise au point de technologies entièrement nouvelles. En outre, elles engendraient des coûts unitaires élevés qui incitaient à mettre en balance l’emploi d’armes classiques fondé sur la saturation et celui d’armes de précision dont un petit nombre se révélait suffisant pour atteindre le but poursuivi ; mais à l’épreuve des conflits de l’après-guerre, l’intérêt de telles armes ne devait pas tarder à s’imposer.
L’un des exemples les plus significatifs de l’apport de la précision dans le domaine opérationnel nous est fourni par un raid de l’US Air Force dans les derniers mois de la guerre du Vietnam. L’objectif recherché était la destruction d’un pont situé sur l’un des principaux goulets d’étranglement de la piste Hô Chi Minh, artère vitale pour le ravitaillement des forces Viêt-cong au Sud-Vietnam. Malgré des conditions météorologiques très défavorables, le passage de deux vagues de quatre avions porteurs de bombes guidées laser fut suffisant, en 1972, pour détruire ce pont qui avait résisté, entre 1965 et 1968, à quelque 600 raids de bombardiers utilisant des bombes non guidées et au cours desquels une trentaine d’appareils furent perdus. L’évocation de ces quelques chiffres montre que l’emploi d’armes précises permet non seulement de réaliser des économies appréciables sur le volume des forces engagées, mais aussi de libérer des moyens et du temps pour conduire d’autres actions tout en réduisant les pertes en vies humaines et en matériels.
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