Le conflit de faible intensité a pris une importance particulière avec l'apparition d'une situation géostratégique mondiale nouvelle ; pourtant, il a toujours existé ! L'auteur analyse ci-dessous la doctrine américaine dans ce domaine. Un large extrait de cette étude devrait paraître dans la revue Ares ; l'ouvrage complet peut être consulté dans les bibliothèques universitaires de Grenoble II et Lyon III.
Le conflit de faible intensité : analyse d'une conception américaine
Au début des années 80 l'actualité du débat stratégique donne au low intensity conflict (LIC) une nouvelle dimension. Celui-ci devient l'un des deux piliers de la stratégie américaine. L'Initiative de défense stratégique devait répondre à la menace provenant de l'Union Soviétique. L'autre menace globale sur les intérêts américains venait de petites actions militaires, de la subversion et de mouvements de guérilla auxquels il fallait répondre avec des moyens adaptés. C'est le domaine des conflits de faible intensité.
La défaite au Vietnam a créé aux États-Unis une forte résistance contre toute implication militaire à l'étranger. Les forces pacifistes ont cherché à imposer des restrictions juridiques à toute nouvelle participation américaine à des conflits dans le Tiers Monde. Le War Powers Act ne permet plus au président d'ordonner un déploiement étendu de troupes en dehors des frontières sans l'approbation du Congrès. Le budget des forces spéciales est réduit de façon draconienne, les capacités paramilitaires de la CIA sont considérablement restreintes, on ne parle plus de contre-insurrection, et le département de la Défense se tourne vers les tâches moins controversées de l'amélioration des capacités dans le théâtre européen. Cependant, un petit groupe d'officiers, d'analystes et d'opérateurs politiques au sein de « l'establishment » de la sécurité nationale, soutenu par le mouvement néo-conservateur, entreprend de rétablir l'hégémonie globale des États-Unis. La politique de l'Administration Carter favorise l'apparition d'un climat d'opinion qui portera au pouvoir une droite offensive et agressive, et qui ne tardera pas à mettre en œuvre les propositions de ce groupe.
Les promoteurs du conflit de faible intensité plaident pour un réexamen complet des stratégies et des capacités des États-Unis pour mener des guerres contre-révolutionnaires dans le Tiers Monde. La dynamique révolutionnaire qui caractérise le début des années 80 en Amérique centrale vaut à leurs recommandations une attention grandissante, et l'Administration Reagan permet la mise en pratique de leurs théories. L'écart entre les intérêts vitaux des États-Unis dans le monde et leurs moyens serait moins préoccupant si tant de doutes n'avaient pas été exprimés sur l'efficacité du système lui-même. Ces interrogations conduisent au sujet brûlant de la « réforme de la défense » (military reform movement). Selon les critiques, l'armée des États-Unis n'est pas capable de mener des guerres de faible intensité, car sa façon de conduire un conflit est basée sur l'attrition. Pour faire face à des situations « irrégulières », elle devrait adopter un concept de manœuvre relationnelle. De plus, l'armée dispose d'une structure interne complexe, composée de trop d'officiers et d'administrateurs, qui ne garantit pas une méthode unifiée et une cohérence stratégique des actions militaires. Une meilleure solution serait la création d'une infanterie légère spécialisée et orientée vers l'exécution des manœuvres relationnelles.
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