Les conceptions stratégiques du général de Gaulle face au monde de 1990 (novembre 1990)
Les stratèges élaborent des principes, formulent des règles, à partir de leurs études et de leur expérience, en vue de les appliquer utilement à des situations nouvelles. Cet effort de généralisation distingue le stratège, tourné vers l’avenir, de l’historien qui décrit et fait comprendre le passé, ou du tacticien qui pense et agit dans le présent.
À l’automne de cette année 1990 qui a vu tant de changements en Europe, vingt ans après la mort du général de Gaulle, il est intéressant de confronter la stratégie gaulliste avec les réalités d’aujourd’hui, de s’interroger sur sa validité au regard du présent et du proche avenir.
LA RENAISSANCE DU SENTIMENT NATIONAL
Pour de Gaulle, la nation constitue l’élément fondamental de la stratégie dont la fonction est d’assurer sa survie dans un monde plein de périls, sa défense contre les agressions, son indépendance, condition nécessaire de la liberté des citoyens. Implantée sur une terre créatrice d’une culture, renforcée par les péripéties de son histoire, la nation n’est pas immortelle mais au moins durable. Elle peut survivre aux malheurs et même renaître après les catastrophes. Elle est plus forte que les idéologies et les religions : « Il est trop tard pour qu’aucune idéologie, notamment le communisme, l’emporte sur le sentiment national », disait de Gaulle dans sa conférence de presse du 9 septembre 1968. Cette immuable conviction explique le scepticisme qu’il a toujours affirmé quant aux méthodes de la guerre révolutionnaire mises en œuvre sur les théâtres d’opérations extérieures, c’est-à-dire hors du territoire national.
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