Gendarmerie - Les groupes d'intervention régionaux
Après avoir été un des principaux thèmes de campagne des récentes élections présidentielles et législatives, la sécurité a été logiquement élevée au rang de priorité numéro un du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. Parmi les diverses mesures rapidement décidées, et sur lesquelles nous reviendrons à la faveur de prochaines chroniques (notamment le placement de l’emploi des services de la gendarmerie sous la responsabilité du ministre de l’Intérieur, de la Sécurité intérieure et des Libertés locales), une attention particulière doit être réservée aux groupes d’intervention régionaux (GIR), sur un plan à la fois opérationnel et symbolique.
Leur mise en place, largement médiatisée, répond, en effet, à la nécessité manifeste de mobiliser, dans le cadre d’une action interministérielle, pluridisciplinaire destinée à lutter contre l’économie souterraine et les formes de délinquance qui l’accompagnent, non seulement la police et la gendarmerie, mais aussi les autres services administratifs susceptibles d’être réunis dans une démarche répressive commune, à savoir les services fiscaux, des douanes, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, du travail et de l’emploi. Il n’est guère besoin de souligner l’importance de cette lutte contre l’économie souterraine tant il est vrai qu’elle permet de prolonger, voire d’engager des actions policières et judiciaires contre des formes plus visibles, plus violentes de délinquance. En d’autres termes, l’objectif est de s’opposer aux bandes criminelles qui sévissent notamment dans les quartiers difficiles en prêtant une attention soutenue, globale et méthodique, au produit de leurs méfaits (trafics de stupéfiants, vols avec violence, cambriolages…), en recourant pour ce faire à des instruments juridiques d’ordre fiscal, douanier et administratif. Il convient d’observer que les activités de ces bandes tendent souvent à relever de la délinquance itinérante, frappant indistinctement les zones urbaines, périurbaines et rurales (vols à la voiture bélier, vols par ruse contre les personnes âgées, agressions à domicile…).
De manière plus latente, la mise en place des GIR entend aussi donner un signal fort à l’ensemble des services de sécurité mobilisés dans la lutte contre l’insécurité, en expérimentant une formule de rapprochement relativement souple, d’une part, entre les deux composantes du système policier (police et gendarmerie), d’autre part, entre ces dernières et d’autres services répressifs non-policiers. Aussi les GIR ont-ils l’ambition de faire travailler ensemble localement, au sein d’unités aisément mobilisables et modulables, dans le cadre d’actions de renseignements et d’enquêtes, des policiers et des gendarmes, mais aussi des douaniers et des fonctionnaires des impôts, de la répression des fraudes et de l’inspection du travail. Ainsi, dans une perception optimiste, est-on tenté de voir dans le GIR le précurseur d’autres formes de mise en commun de savoirs et de pratiques, de manière à sortir d’un système dans lequel la coopération interservices se limitait, sous réserve de certaines initiatives locales n’ayant aucun caractère officiel, à de simples réunions de concertation, à la présence d’officiers de liaison et à l’action d’instances d’harmonisation dans le domaine technique et logistique. Dans l’hypothèse où les GIR feraient la preuve sur le terrain de l’efficacité de cette forme de dispositif interservices, prenant la forme d’une sorte d’administration de mission, il pourrait être opportun d’étendre ce type de regroupement à d’autres problèmes d’insécurité, de manière à envisager, localement, la mise en place de structures susceptibles de provoquer, au quotidien, une authentique collaboration opérationnelle entre les services publics engagés dans la lutte contre la délinquance et la violence ; ce qui semble supposer une certaine unité de commandement, mais aussi la constitution d’un espace administratif d’échange et de synergie, de mise en commun et de rassemblement pour les acteurs de terrain, sans remettre en cause leurs particularités juridiques, fonctionnelles et culturelles.
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