La guerre
La guerre
La guerre, à ne pas confondre avec De la guerre, est un opuscule de vulgarisation dont la collection « Que sais-je ? » a le secret. Sous un volume d’un coût réduit on trouvera « clarté, simplicité, synthèse ». L’ouvrage de Bruno Tertrais ne déroge pas à la règle. En moins de 130 pages, petit format, le lecteur raisonnablement érudit, aura tôt fait de survoler l’essentiel de l’histoire et de l’évolution d’une des activités majeures de l’humanité, s’étriper. Descriptions et faits l’emportent largement. Quant aux raccourcis approximatifs et aux quelques prévisions hasardeuses, le spécialiste voudra bien les mettre au rang du simple souci de faire bref et de ne pas encombrer par des subtilités.
Le mot guerre est généralement réservé aux contentieux ayant pour enjeu un territoire, ou un gouvernement, ayant causé la mort d’au moins 1 000 personnes dans l’année du fait d’usage des armes. Aujourd’hui, après la guerre froide et la décolonisation, vient le temps des guerres civiles et des opérations internationales. Les guerres sont moins nombreuses, intra-étatiques, plus courtes, plus idéologiques, plus contrôlées et moins meurtrières pour les militaires à l’inverse des civils. Les opérations sont de plus en plus multinationales ou en coalition, interarmées, sur des espaces croissants et avec une densité de force au combat de plus en plus faible. La lutte contre les menaces non militaires prend une place de plus en plus importante.
Deux « nouveaux espaces de bataille », l’extra-atmosphérique et le cyberespace, permettent à la révolution de la précision de limiter les forces sur le terrain. Avec cependant des limites. Les moyens actuels sont vulnérables aux actions de guérilla. Toutes les grandes opérations depuis la fin de la guerre froide ont montré que rien ne remplace l’action au sol et la présence en nombre des forces terrestres, souvent indispensables à la satisfaction du but politique recherché.
Le jus ad bellum ou droit à la guerre s’appuie sur les conventions de La Haye et la Charte des Nations unies. Elles restreignent implicitement le recours à la guerre à deux cas : la légitime défense et le mandat de l’ONU. Plus récemment, le « droit d’ingérence » et « la responsabilité de protéger » ont étendu le domaine de la « guerre juste ».
Le jus in bello ou droit dans la guerre visait dès l’origine à la délimiter dans le temps et à distinguer les combattants des civils. Avec la guerre de masse, fruit de la Révolution française, et de la guerre totale que fut la guerre de Sécession américaine apparaissent des normes plus strictes pour des raisons humanitaires. Elles font l’objet de conventions successives adoptées à La Haye dès 1899, et à Genève partir de 1949. Elles sont complétées par les accords sur la maîtrise des armements et le désarmement. Elles sont renforcées par l’avancée considérable du droit pénal international qui a créé la notion de crime contre l’humanité, par les tribunaux internationaux et le développement de « la compétence universelle » qui permet à une juridiction nationale de connaître des crimes de guerre sur toute la planète.
La prévention de la guerre met en œuvre tout à la fois, la dissuasion, conventionnelle et nucléaire, les systèmes d’alliances, les mesures de confiance et d’arbitrage, la diplomatie préventive et les médiations informelles. Aujourd’hui toutes ces dispositions concourent à la paix, l’une des caractéristiques propres de la civilisation moderne étant d’avoir mis un terme à la « normalité de la guerre ».
Si les guerres civiles sont moins nombreuses, la fin de la guerre n’est pas prête à pointer sur l’horizon. Les risques de conflits interétatiques majeurs demeurent. Ils se répartissent sur un espace allant de la Méditerranée à la mer du Japon, avec des zones particulièrement belligènes comme le Proche-Orient, mais surtout l’Asie où sont situés les risques les plus significatifs. Quant aux enjeux, qu’ils ressortissent des civilisations, du climat ou des ressources, on se gardera bien de leur attribuer une sorte d’inéluctabilité qui ne pourrait que s’avérer le produit d’un effet de mode.