Puissance légitime mais fragile, aux forces et aux faiblesses répertoriées par l’auteur, la Chine joue sur les deux tableaux pour inaugurer la voie imprévisible d’une superpuissance atypique, mondiale par sa masse et son empreinte occidentale, mais fondamentalement et avant tout chinoise par sa culture et son histoire.
La Chine : une superpuissance atypique
China: an atypical superpower
The author describes the strengths and weaknesses of China, a real, yet still fragile, world power. The country is playing on these very strengths and weaknesses in establishing itself as an atypical superpower through sheer weight, using its Western influence on the one hand and its fundamentally Chinese culture and history on the other.
Sur la lancée d’un développement exceptionnel depuis trente ans, la Chine est en train de se positionner comme une des puissances globales du XXIe siècle. Rien de plus normal qu’une telle ascension : l’histoire fourmille de cas semblables où s’opère le jeu de relève des puissances déclinantes par les puissances montantes. Mais l’émergence chinoise diffère des phénomènes précédents, tous coulés dans un moule occidental et suscités par la guerre. Elle procède d’abord d’un modèle asiatique, hermétique aux esprits occidentaux, et qui fait d’elle une puissance originale. Mais ce qui la distingue surtout de ce que nous apprend l’histoire, c’est l’effet XXL multiplié par sa soudaineté : il s’agit en fait de l’irruption d’un géant atypique dans l’univers structuré et cadenassé des relations internationales, qu’elles concernent la politique, l’économie ou la culture.
D’ores et déjà, et encore que les conséquences de l’émergence d’une puissance globale chinoise soient loin d’avoir atteint leur zénith, son empreinte sur notre monde signale le début d’une nouvelle ère de l’humanité. Nous commençons à peine à en prendre conscience, mais surtout à nous en inquiéter : pour nous-mêmes d’abord, pays occidentaux dont l’ascension chinoise souligne en creux le déclin ; pour l’avenir du monde ensuite, dont la Chine devrait prendre à terme la direction. À poursuivre en effet les courbes de croissance de façon linéaire pendant une trentaine d’années, la Chine parviendrait au statut de superpuissance dominante. Et, compte tenu de ce qu’on croit savoir des Chinois, de leur volonté de revanche, de leur insatiable appétit économique, de leur masse démographique, d’une certaine indifférence aux valeurs humanistes, cette hypothèse fait peur.
Cette hypothèse est effectivement terrifiante dans la mesure où elle conduit de façon quasi mécanique au choc des puissances, à un conflit inévitable entre les deux empires américain et chinois. Et elle l’est d’autant plus qu’elle apparaît crédible selon les critères habituels et qu’elle est largement répandue dans les milieux géopolitiques et économiques des deux côtés de l’océan Pacifique.
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