Militaire - États-Unis : politique de défense exposée par le président Nixon - Grande-Bretagne : le Livre blanc sur la défense - Belgique et Pays-Bas : la protection civile - République fédérale d'Allemagne (RFA) : le projet de budget de défense 1970 - URSS : les manœuvres Dvina - Pologne : le calcul électronique dans l'armée - Tchécoslovaquie : activités militaires - Chine populaire : l'effort de « préparation à la guerre » - Corée du Nord : sa puissance militaire
États-Unis : politique de défense exposée par le Président Nixon
Dans son message sur l’état du monde, diffusé le 18 février, le président Nixon a tracé les grandes lignes de la politique extérieure et de la politique de Défense des États-Unis pour les dix années à venir.
En matière de défense, la politique américaine reposera dans les années 1970 sur la stratégie « d’une guerre et demie » par opposition à la stratégie de « deux guerres et demie » appliquée jusqu’alors, c’est-à-dire que les États-Unis ne maintiendront plus désormais que les forces de manœuvre nécessaires pour faire face simultanément à un conflit d’envergure soit en Europe, soit en Asie et à un conflit mineur alors qu’ils envisageaient précédemment de pouvoir mener à la fois deux conflits majeurs et une guerre limitée.
Les forces nucléaires continueront d’assurer leur mission de dissuasion à l’égard de toute menace d’une puissance nucléaire contre les États-Unis ou leurs alliés.
Le Président a souligné l’impossibilité pour les États-Unis de faire face à toutes les formes de menaces, en particulier à la subversion et aux guerres de libération, et indiqué que le meilleur moyen de s’en protéger est encore de les prévenir par l’aide au développement économique, les réformes sociales et une assistance militaire qui doit se traduire par un appui logistique approprié.
En ce qui concerne le rapport des forces nucléaires stratégiques entre l’URSS et les États-Unis, le Président considère que l’Union soviétique a atteint la parité dans le domaine des missiles balistiques. Compte tenu de la volonté soviétique de continuer à accroître leur capacité offensive, en particulier à l’aide de missiles géants SS-9, il lui paraît nécessaire, dans l’immédiat, de faire entamer les travaux pour la réalisation de la seconde phase du programme de défense antimissiles Safeguard. Cette décision lui semble d’autant plus urgente que la Chine installera dans la décennie 1970-1980 des bases de missiles intercontinentaux.
À propos de la limitation des armements stratégiques, M. Nixon considère que la « clé de toute grande négociation » réside dans le succès des conversations qui doivent se poursuivre à Vienne le 16 avril. Il n’est pas pour autant prêt à prendre de grands risques : les États-Unis feront à Vienne des propositions concrètes pour jeter les bases d’un accord mais ne « baisseront pas leur garde ».
Grande-Bretagne : le Livre blanc sur la Défense
Le gouvernement britannique a publié le 19 février le Livre blanc sur la Défense pour l’exercice 1970-1971 (1). Le document annonce une légère augmentation en valeur absolue des crédits militaires, rappelle les fondements de la politique de Défense, donne le déploiement des forces anglaises outre-mer et présente de nouvelles mesures de réorganisation du ministère. Il montre la continuité des programmes d’armement et fait état d’une réduction des crédits de recherche.
Budget de défense
Le budget de Défense pour 1970-1971 se monte à 2 280 millions de livres (environ 30 milliards de francs) contre 2 266 M£ pour l’exercice précédent (2). Les crédits augmentent donc en valeur absolue de 14 M£ ; mais, lorsqu’ils sont exprimés à prix constants 1969, ils ne représentent plus que 2 138 M£, soit 128 M£ de moins que l’an dernier.
L’évolution du pourcentage des dépenses de Défense par rapport au Produit national brut, évalué au coût des facteurs, montre une nouvelle régression passant de 7 % du PNB en 1964, à moins de 6 % en 1969 et à 5,5 % en 1970. Il est prévu que ce pourcentage se situera en dessous de 5 % en 1972-1973.
Politique de défense
Le Livre blanc n’apporte pas de changement aux orientations générales de la politique de défense britannique. Les grandes options déjà prises sont confirmées :
– Coopération accrue avec les pays européens de l’Otan.
– Concentration des forces en Europe occidentale.
– Évacuation des garnisons situées à l’Est de Suez avant le 31 décembre 1971.
– Réduction des engagements outre-mer.
– Achèvement du programme Polaris.
Trois idées ressortent dans la partie consacrée à l’Europe :
– L’accent est mis d’abord sur le rôle primordial de l’Otan qui tire sa force essentielle de l’engagement américain dans l’Alliance.
– La place de la Grande-Bretagne au sein de celle-ci demeure privilégiée, puisque le Royaume-Uni possède la capacité militaire la plus élevée d’Europe occidentale. L’Angleterre joue en outre, avec l’Allemagne, un rôle éminent dans la définition de la stratégie de « réponse graduée » mise au point par l’Alliance. À ce sujet, le document insiste sur l’importance des forces conventionnelles.
Il importe aussi, selon le Livre blanc, que les efforts britanniques tendent à la création d’une « entité européenne de défense » au sein de l’Otan. Un tel organisme, auquel le Président Nixon s’est déclaré favorable, permettrait à l’Europe de faire entendre sa voix, irait dans le sens d’une unité politique européenne et augmenterait la capacité technologique du vieux continent. Dans cet esprit, les Européens doivent coopérer plus étroitement entre eux en vue d’harmoniser leurs doctrines militaires et la production de leurs armements.
La contribution britannique à l’Otan est considérée comme importante. En effet, la quasi-totalité de la Royal Navy et de la Royal Air Force (RAF) est réservée pour emploi ; l’Armée du Rhin (British Army of the Rhine, BAOR) et la RAF en Allemagne sont affectées à l’Alliance ; la 3e Division de la Réserve stratégique et le 38e groupe de transport adapté sont mis à la disposition du SHAPE sous le nom de « Réserve mobile du Royaume-Uni ». L’Army et la RAF participent aussi à la constitution de la force mobile de l’Otan. Enfin, la Marine, qui s’apprête à augmenter sa présence en Méditerranée, peut également détacher un commando de fusiliers-marins sur le flanc nord de l’Alliance.
Volume et déploiement des forces
Les effectifs des Forces armées, y compris les troupes recrutées outre-mer, ont diminué de 15 000 hommes, passant de 411 750 (au 1er janvier 1969) à 396 520 (au 1er janvier 1970).
Au Royaume-Uni même, la diminution atteint 8 580 h par suite de la dissolution de nombreuses unités ; sept bataillons sont toutefois maintenus en Ulster.
En Extrême-Orient, d’avril 1969 à avril 1970, la déflation aura porté sur le rapatriement de 6 500 h, appartenant en majeure partie à la brigade du Commonwealth et sur le licenciement de 1 900 Gurkhas, de 1 100 autres militaires autochtones et de 4 800 employés civils. Au 1er avril 1970, les bases de Térendak et de Seletar seront transférées respectivement aux gouvernements de Malaisie et de Singapour.
L’évacuation de la Cyrénaïque sera terminée le 31 mars 1971 et celle des bases du golfe Persique débutera cette année.
Par contre, les garnisons de l’Armée du Rhin, et celles situées en Méditerranée, sont maintenues au niveau de 1969.
Réorganisation du ministère de la Défense
Le Livre blanc prévoit d’autre part dans les structures du ministère des changements destinés à favoriser une meilleure coordination et une plus grande centralisation des services.
Un comité présidé par le sous-secrétaire d’État à la Défense a été constitué pour proposer des mesures de réorganisation. Les réformes suivantes seront réalisées d’ici à la fin de l’année ; elles porteront sur la suppression de trois postes civils importants :
– Les deux secrétariats d’État chargés de « l’Équipement » et de « l’Administration » (3) fusionneront pour céder la place à un Minister of Defence for the Armed Forces chargé de traiter des problèmes de personnel, de logistique et d’équipement des Armées.
– Les trois sous-secrétaires d’État (Terre, Mer et Air) (4) seront remplacés par un seul, éventuellement par deux.
Par ailleurs, les pouvoirs du Chef d’état-major des armées (5) et du chef du personnel et de la logistique (6) seront renforcés.
Mesures diverses
La rationalisation des services logistiques et des moyens d’instruction se poursuit. Depuis cinq ans, la Royal Navy a dissous quinze dépôts, l’Army cinquante et la RAF six. Cette politique continuera au cours des huit prochaines années.
Le Livre blanc expose quels sont les programmes d’équipement et d’armement des trois Armées en vue de la modernisation de leurs matériels. Depuis le 1er juillet 1969, la RAF n’assure plus la mission de représailles stratégiques qui a été transférée à la force Polaris de la Royal Navy. Celle-ci comporte trois sous-marins actuellement opérationnels, le quatrième devenant opérationnel au cours de cette année.
Enfin sont données quelques indications intéressantes sur le recrutement des engagés et le régime des soldes.
Les efforts réalisés pour susciter des engagements commencent à porter leurs fruits. Ainsi, en 1968, les Armées n’avaient-elles enregistré que 29 000 engagements pour 38 000 postes à pourvoir ; en 1969 par contre, le nombre d’engagés volontaires s’est élevé à 35 000 h environ.
Un régime de solde profondément remanié entrera en vigueur sous peu. Les militaires devront désormais payer leur nourriture et leur logement, mais les traitements de base seront comparables à ceux du secteur civil. Cette modification générale des indices entraînera une augmentation du budget de Défense.
Quant aux crédits de recherche et de développement, ils s’élèvent à 22 M£, soit 14 M£ de moins qu’en 1969 et 32 M£ de moins qu’en 1968, somme qui dépasse légèrement les réductions annoncées dans le Livre blanc supplémentaire de juillet (30 M£). Cette mesure confirme le transfert des crédits de recherche militaire à la recherche civile.
Belgique et Pays-Bas : la protection civile
En Belgique, au cours de la discussion du budget pour 1970, M. Harmegnies, ministre belge de l’Intérieur, a déclaré que les services de la Protection civile, placés sous sa juridiction, devraient faire l’objet d’une réforme qui pourrait être réalisée parallèlement à celle des services d’incendie.
C’est en 1951 qu’a été créée la Protection civile belge. Elle avait bénéficié, tout au moins au début, de crédits importants. Les cadres étaient choisis parmi les officiers retraités qui avaient donné à l’organisation une allure assez militaire. Ils avaient procédé au recrutement de volontaires et à leur formation, à l’achat massif de matériel moderne (moyens de transport, de lutte contre l’incendie, de déblaiement et de levage, etc.). Trois colonnes mobiles, installées respectivement à Liedekerke, Ghlin et Kemexhe, avaient été mises sur pied. Ces colonnes, conçues pour le temps de guerre, peuvent aussi être utilisées en temps de paix. Équipées de façon à pouvoir combattre les sinistres les plus divers, elles sont, en principe, appelées à opérer en renfort des corps de sapeurs-pompiers locaux sur demande des bourgmestres. En cas de sinistre important, la coordination des services de secours incombe aux gouverneurs de province.
Dès 1954, les crédits ont diminué et les militaires en retraite ont été remplacés par du personnel civil instruit en majeure partie à l’école de Florival.
Actuellement, le personnel non permanent est composé de 10 000 volontaires rétribués qui signent un contrat avec la Protection civile et sont à sa disposition en cas de nécessité. Ils doivent suivre quinze heures de cours par an. Le nombre de volontaires est très insuffisant puisqu’il ne permet de réaliser qu’à 63 % l’effectif théorique des cadres permanents, qu’à 80 % celui du personnel de l’Administration centrale et à 52 % celui des colonnes mobiles. En fait, ces dernières ne parviennent même pas à assurer l’entretien du matériel.
Cette année, le budget de la protection civile s’élève à 200 MF belges environ (7).
Une des suggestions les plus souvent avancées pour réorganiser efficacement ce service consiste à en confier la charge aux forces armées, mais aucune décision ne se dessine encore dans cette direction.
Aux Pays-Bas, la Protection civile qui fonctionne depuis 1957 dépend du ministère des Affaires générales. Elle est dirigée par un général en retraite qui coordonne l’ensemble des secours en cas de sinistre important. En 1969, son budget total s’est élevé à 100 M de florins environ (8) dont les 2/3 concernent des crédits de fonctionnement.
Le personnel est en grande majorité composé de volontaires (100 000 environ) dont les effectifs se répartissent entre les équipes de premiers secours, les services de sauvetage, les corps de sapeurs-pompiers et le service de protection contre les retombées nucléaires. Il existe en outre un « Corps des colonnes mobiles » et une « Brigade des sinistres ».
Le « Corps des colonnes mobiles » constitue un des rouages les plus importants du système de protection civile. Il comprend : un groupe de commandement, 23 colonnes mobiles et un centre d’entraînement. Les Colonnes, composées en majorité de réservistes, sont spécialisées : 12 dans la lutte contre les incendies, 6 dans les opérations de sauvetage et 5 dans les premiers secours. Le corps qui comprend au total 22 000 h, dépend de l’armée de terre en temps de paix, mais il est placé sous les ordres du Commandant de la Protection civile en temps de guerre.
La « Brigade des sinistres » est une unité créée en 1969 pour intervenir à l’extérieur ou à l’intérieur des Pays-Bas. En cas de cataclysme international elle mettrait, à la disposition de l’ONU, 1 700 militaires volontaires provenant d’unités d’active des trois armées. Placée sous le commandement du Chef d’État-major des forces terrestres, elle comprend : un PC, un bataillon d’infanterie, deux compagnies de fusiliers-marins, deux compagnies de transport, une compagnie sanitaire, une compagnie du génie, un peloton de gendarmerie et un soutien logistique. Elle ne dispose pas de matériel spécialisé, mais utilise celui qui est en service dans les unités : bulldozers, excavateurs, groupes électrogènes, ambulances, etc.
Les délais de mise en route paraissent encore importants : deux jours pour le détachement précurseur, trois jours pour le premier échelon, quatre jours au moins pour le second échelon.
République fédérale d’Allemagne (RFA) : le projet de budget de défense 1970
Arrêté définitivement en janvier dernier par le Cabinet fédéral, le projet de budget pour l’exercice 1970, soumis au Parlement le 18 février, pourrait être voté en avril ou mai prochain.
Son montant a été fixé à 91,433 Md de deutsche mark (9). Compte tenu de la situation économique allemande, caractérisée par une forte expansion et une hausse importante des salaires et des prix, il a été décidé de bloquer provisoirement 2,6 Md de crédits.
S’inscrivant dans le cadre des prévisions du plan financier à moyen terme 1968-1973, le budget de défense se voit doter de 20,350 Md DM, ce qui représente 22,24 % du budget général et 3,14 % du PNB prévu.
Sur cette somme, 1 080 M DM sont bloqués. Les crédits effectivement disponibles ne s’élèvent donc qu’à 19,270 Md DM. Le blocage des crédits porte entièrement sur la rubrique « Matériels et installations militaires » dont le montant fixé à 8,780 Md DM (supérieur de 8 % à celui de 1969) se trouve ainsi ramené provisoirement à 7,700 Md DM.
Les blocages les plus importants affectent les acquisitions d’avions (450 M DM) et de véhicules de combat (200 M DM).
Ainsi, en dépit de la hausse moyenne annuelle d’environ 5 % prévue pour le budget de défense dans le plan 1968-1973, la tendance se poursuit d’une diminution relative des crédits militaires par rapport au budget fédéral et par rapport au PNB.
Le blocage des crédits, mesure qui, il faut le souligner, affecte en priorité le ministère fédéral de la Défense, accentuera encore le caractère d’austérité de ce budget.
Importance relative du budget de défense pour la période de 1967-1970 (en milliards de DM)
Année |
PNB au prix du marché |
Budget fédéral |
Budget de Défense |
Pourcentage par rapport au PNB |
Pourcentage par rapport au budget fédéral |
1967 |
483,6 |
78,464 |
18,463 |
3,82 % |
23,53 % |
1968 |
529,8 |
80,657 |
18,055 |
3,41 % |
22,38 % |
1969 |
592,1 |
83,346 |
18,79 |
3,17 % |
22,54 % |
1970 |
648 |
91,433 |
20,35 |
3,14 % |
22,24 % |
Le budget de Défense 1970 dans le cadre de la planification financière 1968-1973
|
1968 |
1969 |
1970 |
1971 |
1972 |
1973 |
Crédits prévus en 1967 |
18,175 |
18,860 |
19,700 |
20,300 |
|
|
Crédits prévus en 1968 |
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18,800 |
19,768 |
20,368 |
21,075 |
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Crédits supplémentaires prévus le 15-1-1969 |
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0,199 |
0,667 |
0,801 |
0,713 |
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Crédits prévus en 1970 |
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|
20,350 |
21,059 |
21,818 |
22,138 |
Budgets votés ou prévus |
18,054 |
18,790 |
20,350 |
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URSS : les manœuvres Dvina
L’activité militaire a été très soutenue dans les forces soviétiques durant les dernières semaines, malgré un allégement temporaire pour la célébration du 52e anniversaire des armées autour du 23 février 1970. Ce développement correspond au déroulement normal du cycle d’instruction et culmine avec les grandes manœuvres Dvina du 1er au 15 mars.
En Biélorussie, les manœuvres Dvina, auxquelles la presse a fait une large publicité, ont débuté le 1er mars 1970 par une phase de préparation et de mise en place faisant appel à tous les moyens de transport sur une grande échelle ; des unités de plusieurs régions militaires y ont pris part : 1re DFM de Baltique ; 2e DFMG « Taman » de Moscou, 120e DFMG « Rogatchen » de Biélorussie (10), éléments des Carpathes, division aéroportée de la Garde « Tchernigov », 7 à 8 divisions au total, des formations aériennes, des services, groupant des effectifs très supérieurs à 100 000 hommes y compris des réservistes.
L’aérotransport a été très important : un régiment de fusiliers motorisés au complet, des missiles sol-sol Scud B et sol-air Ganef été amenés dans la zone de manœuvre par un pont aérien utilisant des avions An-22.
La phase active a débuté le 10 mars par une violente attaque du parti Nord qui, après une préparation d’artillerie et d’aviation, a franchi la Dvina occidentale à l’ouest de Vitebsk et largement entamé le front du parti sud, malgré les contre-attaques, grâce au parachutage d’une division (8 000 h en vingt-deux minutes à partir d’Antonov An-12 et d’un An-22) sur les arrières immédiats de l’ennemi. L’arme nucléaire a été « employée » par les deux adversaires et le parti sud paraît avoir été disloqué par le parti nord après plusieurs combats de rencontre.
Cette phase des manœuvres s’est achevée le 13 mars par des démonstrations de tir et, en particulier, la présentation d’une « arme nouvelle », dont les capacités seraient, selon la presse, très étendues puisqu’elle aurait une efficacité à la fois contre les chars et contre les avions. Un défilé des troupes à Minsk a clôturé les manœuvres.
Les troupes, en raison des rigueurs de la saison et de la difficulté du terrain, ont été placées dans des conditions difficiles, compliquées encore par les ordres du commandement, qui a proscrit le montage de tentes. Les opérations ont été caractérisées par la recherche de la vitesse dans tous les domaines : mobilité des troupes, prise des décisions, rythme des attaques.
Le maréchal Gretchko, ministre de la Défense de l’URSS assurait lui-même la direction de la manœuvre ; les deux partis étaient respectivement commandés par le général-colonel Chavrov, commandant la RM de Leningrad et le général-colonel Ivanovski, commandant la RM de Moscou. Les plus hautes personnalités militaires soviétiques étaient présentes, ainsi que les ministres de la Défense des pays du Pacte de Varsovie, à l’exception de celui de la Roumanie, tous les chefs d’états-majors généraux, et les nouveaux représentants des armées satellites auprès de l’état-major du pacte à Moscou. Le colonel Sardar Abdul Ali, commandant le corps « centre » de l’armée afghane, était l’invité personnel du maréchal Gretchko. Enfin, M. Leonid Brejnev, secrétaire général du PC soviétique, est arrivé le 13 mars à Minsk, où le ministre de la Défense lui a fait un rapport sur les manœuvres.
La qualité et le rang des assistants, et la place que leur ont réservée les moyens d’information, mettent en évidence l’importance de ces manœuvres, qui ont constitué une sorte d’examen de la préparation au combat des forces, à la veille du 100e anniversaire de la naissance de Lénine et du 25e anniversaire de la victoire sur l’Allemagne.
Pologne : le calcul électronique dans l’Armée
Une conférence s’est tenue en janvier 1970 à l’Académie d’état-major général sous la présidence du général major Mieczislaw Obiedzinsky, chef d’état-major du Commandement des arrières ; elle groupait des chefs et techniciens des services des arrières et des spécialistes de la technique du calcul électronique, ainsi que des cadres de l’Académie.
Le rapporteur a souligné la nécessité de rechercher en permanence de nouvelles solutions correspondant aux exigences du champ de bataille moderne. L’utilisation de la technique du calcul électronique liée à un système de transmission de données présente à ce point de vue de grandes possibilités.
Une plate-forme d’action a été établie pour le perfectionnement du système de direction des arrières.
Tchécoslovaquie : activités militaires
Les manœuvres importantes qui se sont déroulées du 10 au 19 février 1970, entre Milovice et Doupov, ont mis en œuvre des unités soviétiques et tchèques, aux ordres d’états-majors mixtes. Pour des raisons politiques une intégration à l’échelon des bataillons a été pratiquée et aurait d’après le général Mayorov, commandant le groupe de forces soviétiques « centre », été une excellente école d’éducation internationaliste pour les soldats des deux pays.
Dans un article publié par la Krasnaya Zvezda, le général Dzur écrit que « les doutes concernant les mesures prises par nos alliés ont été dissipés une fois pour toutes ». « L’armée tchèque, dit encore le ministre, assure la défense des frontières occidentales de la Tchécoslovaquie dans le cadre de la défense conjointe de tout le camp socialiste ». « Les unités des forces armées soviétiques du groupe centre sont entrées sur le territoire tchèque pour y assurer la survie du régime et du développement socialiste ».
Chine populaire : l’effort de « préparation à la guerre »
Selon la Gazette littéraire de Moscou, la Chine consacrerait désormais à sa défense 12,5 % de son revenu national contre 9 à 10 antérieurement. Cette affirmation, malgré son aspect de propagande, paraît très vraisemblable, compte tenu de la priorité donnée à l’effort de préparation à la guerre, même si les renseignements précis recueillis ce mois-ci ne sont que très fragmentaires.
En ce qui concerne les effectifs, il paraît se confirmer que les évaluations occidentales des dernières années sont à reconsidérer comme étant en dessous de la réalité, compte tenu notamment :
– du fait que deux armées au moins ont été reformées ;
– des besoins en effectifs engendrés par la Révolution culturelle puis par la campagne de « préparation à la guerre » ;
– du fait qu’en certains districts deux campagnes de recrutement ont eu lieu en 1969 au lieu d’une les années précédentes ;
– de l’envoi de nombreux jeunes citadins dans les Corps de construction et de production ou dans les unités régulières de l’Armée de libération populaire (ALP)
– de rumeurs persistantes concernant des rappels de réservistes.
L’orientation nouvelle des tâches confiées à l’ALP a trouvé sa confirmation dans le fait que sont maintenant organisés des exercices tactiques au niveau du bataillon et du régiment avec participation de la milice ; ce genre d’exercice était, jusqu’à une époque récente, limité au niveau de la compagnie.
En ce qui concerne l’organisation territoriale du Commandement, la Région militaire de Mongolie a été, semble-t-il, découpée en trois, la partie nord-est étant rattachée à la RM de Shen-Yang, la partie centrale à celle de Pékin et la partie ouest à celle de Lan-Chou.
Dans le domaine des armements nucléaires, un fait est à retenir. Le Secrétaire d’État américain à la Défense, M. Laird, a confirmé les déclarations faites le mois dernier par le général Krulak à propos d’un essai de missile balistique intercontinental (ICBM) dans les douze mois à venir ; il a précisé qu’il estimait la Chine capable de mettre en œuvre de quinze à quarante missiles intercontinentaux dans les années 1976-1978.
Enfin la réapparition du département « Général politique » de l’ALP se confirme.
Corée du Nord : sa puissance militaire
Sur les trois objectifs essentiels définis par le président Kim Il-Sung en 1948 : construction d’une économie indépendante, réunification nationale, création d’une puissance militaire, seul le dernier semble avoir été atteint. L’économie, handicapée par le poids du budget militaire, n’a pu réaliser, malgré l’effort extrême exigé par la campagne du « Ch’Ollima » (11) son Plan septennal (1961-1967) dont l’exécution a dû être retardée de trois ans. D’autre part, depuis la guerre de Corée, aucun des moyens mis en œuvre pour la réunification du pays (pénétration idéologique, guérilla par voie terrestre et maritime) n’a pu aboutir.
Aussi, Kim Il-Sung, pressé de réaliser ses ambitions et tenté d’exploiter une conjoncture favorable pour lui en Corée du Sud (réduction de l’assistance militaire et économique américaine, élections présidentielles), semble-t-il intensifier la préparation de l’ensemble du pays à une guerre éventuelle (malgré la dépendance logistique qui demeure vis-à-vis de l’URSS). Après le 4e Plénum du Parti des travailleurs, décidant un contrôle plus étroit du Parti sur l’éducation des jeunes, une Assemblée générale, tenue en janvier, a donné la priorité absolue aux questions militaires, et Kim Il-Sung est intervenu pour augmenter encore l’emprise du Parti sur l’Armée. Il faut rappeler que de nombreuses purges ont été opérées depuis 1961 parmi les personnalités militaires du pays. Elles se sont poursuivies en 1969 avec l’élimination de trois généraux dont l’adjoint au ministre de la Défense, et, actuellement, une nouvelle épuration serait en cours visant notamment le ministre de la Défense et le chef d’état-major passibles de cour martiale.
Les mesures de réorganisation de l’Armée populaire tendent à une plus grande mobilité et à l’augmentation de la puissance de feu. Des moyens d’infanterie légère seront intégrés au sein des principales unités. Cinq régiments et dix-neuf compagnies équipés de roquettes viennent d’être créés. D’autre part, outre la livraison depuis 1968 de 280 chars T-54/T-55 et la construction, en 1969, de seize bases de missiles sol-air SA-2, les forces coréennes auraient reçu récemment trois destroyers, quarante-six MiG-21, neuf MiG-19 et vingt-quatre avions de transport An-2 fournis par l’URSS. ♦
(1) L’année budgétaire anglaise s’étend du 1er avril au 31 mars.
(2) Le budget de Défense français en 1970 s’élève à 27,188 MdF.
(3) Minister of Defence for Equipment et Minister of Defence for Administration crées en 1967.
(4) Parliamcntary Under-Secretaries of State (Navy, Army, RAF).
(5) Chief of the Defence Staff.
(6) Chief adviser Personnel and logistics.
(7) 1 franc belge = 0,11 franc français.
(8) 1 florin = 1,55 franc.
(9) 1 DM = 1,51 F.
(10) DFM : Division de fusiliers motorisés ; DFMG : Division de fusiliers motorisés de la garde.
(11) « Cheval volant » : équivalent du « Grand bond en avant » chinois.