Maritime - Le réarmement naval britannique - Allemagne : l'élargissement du canal de Kiel
Le réarmement naval britannique
Le réarmement naval britannique se poursuit sans désemparer en 1939. Après l’effort énorme consenti pour les constructions neuves dans les budgets de 1936-1937 et 1937-1938 (respectivement 200 000 et 270 000 tonnes), le programme de 1938-1939 réduit à 190 000 t, parut un programme de consolidation, destiné à donner aux chantiers surchargés le temps de souffler en s’ajustant progressivement aux nouveaux besoins.
Aujourd’hui, l’augmentation de leurs capacités et la remise en état d’arsenaux fermés depuis plusieurs années (tel celui de Rosyth dans le Forth, rouvert au mois de décembre 1938) ont permis de reprendre la marche en avant : les Navy Estimates relatives à l’exercice 1939-1940 (on sait que l’année budgétaire britannique cours du 1er avril au 31 mars) prévoient la mise en chantier de 215 000 t de bâtiments, se décomposant en :
– 2 cuirassés de 40 000 t,
– 1 porte-avions de 23 000 t,
– 4 croiseurs de 8 000 t,
– 2 flottilles de destroyers (16 bâtiments),
– 4 sous-marins,
– 22 escorteurs,
– 1 mouilleur de mines,
– 10 dragueurs de mines,
– 6 vedettes lance-torpilles,
– 5 pétroliers, plus un certain nombre de navires divers.
L’ensemble des dépenses afférentes à la marine dans l’exercice budgétaire 1939-1940 s’élève à près de 150 millions de livres, soit 20 % de plus que dans l’exercice précédent et plus de 26 milliards de francs. Un peu moins de la moitié des ressources nécessaires (70 M) est demandé à l’impôt, le reste provenant de l’emprunt, selon un procédé analogue à notre compte des investissements en capital. Il convient cependant d’observer que celui-ci s’applique aux seules constructions neuves, au lieu que le budget britannique ne distingue pas entre ces constructions et les dépenses courantes.
Le programme de 1939-1940, comparable au précédent en ce qui concerne les grands bâtiments (deux cuirassés, un porte-avions et quatre croiseurs contre deux, un et sept), en diffère sensiblement par le nombre des unités légères de surface : il comprend 38 destroyers ou escorteurs, quand le programme de 1938-1939 ne prévoyait aucun navire de ces types. Il faut voir, sans aucun doute, dans cette brusque augmentation une réplique à l’accroissement de la flotte sous-marine allemande. Elle s’intègre d’ailleurs dans un vaste système de protection du commerce britannique en temps de guerre, dont on se bornera à rappeler ici les lignes essentielles (transformation d’un certain nombre de croiseurs, de sloops et de destroyers âgés en escorteurs antiaériens fortement armés d’artillerie, de pom-poms [NDLR 2023 : canon de marine Vickers de 2 livres] multiples et de mitrailleuses contre avions ; programme d’armement des bâtiments marchands ; réassurance des navires et des cargaisons par l’État ; constitution d’une réserve nationale de tonnage mise en service seulement après l’ouverture des hostilités ; cours de canonnage pour les marins du commerce et cours de défense anti-sous-marine (ASM) pour les officiers : à la fin du mois de janvier dernier, près de 8 000 officiers avaient déjà suivi ces cours, etc.).
Au total, 170 bâtiments de guerre sont à présent en construction en Grande-Bretagne, ou seront mis sur cale avant la fin de 1939.
La flotte, qui était forte au 1er janvier de 1 350 000 t environ (1) (15 cuirassés, 7 PA, 15 croiseurs lourds, 46 croiseurs légers, 171 destroyers et 59 sous-marins) s’est accrue depuis ou doit s’accroître au cours de l’année d’au moins 80 000 t (5 croiseurs, 22 destroyers, 7 000 t de sous-marins).
Allemagne : l’élargissement du canal de Kiel
La nouvelle, officielle depuis le 15 février 1939, que l’Allemagne s’apprêtait à élargir le canal de Kiel a soulevé quelque émotion dans l’opinion étrangère : survenant au lendemain du lancement du cuirassé de 35 000 t Bismarck à Hambourg, elle a pu passer pour une indication que la marine du Reich envisageait la construction à plus ou moins brève échéance de bâtiments de ligne d’un tonnage beaucoup plus élevé.
Si cette hypothèse ne peut être absolument exclue, il convient néanmoins de remarquer que dans son état actuel le canal pourrait encore admettre des navires de dimensions très supérieures à celles du Bismarck : 315 m de long, près de 40 de large et 9 de tirant d’eau, le Bismarck ayant respectivement 241, 36 et 7,9 m.
Les chiffres récemment publiés du trafic du canal en 1938 (53 500 navires et 22.600 000 t), comme le fait qu’il est de plus en plus parcouru par des navires océaniques dont le croisement pose des problèmes difficiles, suffiraient à justifier de nouveaux travaux. Il est vrai que ceux-ci paraissent devoir être grandioses : ils consistent dans le doublement de la largeur, la substitution de deux grandes écluses simples aux quatre écluses doubles de Brunsbüttel et Holtenau, enfin la réfection partielle des ponts. ♦
(1) Ce total comprend un peu plus de 200 000 t de bâtiments hors d’âge, mais que la Grande-Bretagne maintient en service, comme les autres nations, en raison des circonstances. À titre d’indication, le tonnage de la flotte allemande en service ou en construction à la fin de l’année 1938, était d’environ 410 000 t, dont 29 000 hors d’âge.