Institutions internationales - Williamsburg - L'Organisation de l'unité africaine (OUA) en quête d'un nouvel avenir - Les bases américaines en Grèce - La poudrière libanaise
Le « Sommet » de Williamsburg ne peut être considéré comme la réunion d’une organisation internationale, car ces rencontres annuelles des chefs d’État et de gouvernement des sept grands pays industriels du monde non communiste n’ont aucun fondement institutionnel. Elles permettent une confrontation des points de vue, mais ne peuvent pas déboucher sur des décisions contraignantes pour les participants, à la différence du Conseil européen qui, bien qu’étant lui aussi privé de toute existence institutionnelle (il se situe hors des cadres prévus par le Traité de Rome) n’en est pas moins devenu l’organe majeur de la Communauté européenne. Alors que l’on s’attendait à un affrontement sur le plan monétaire, c’est par un accord sur les euromissiles que s’est clôturée la première journée des entretiens. Dans la partie de bras de fer engagée entre Moscou et l’Otan sur la question des missiles de croisière et des Pershing II, la France (qui ne fait pas partie de l’organisation militaire intégrée de l’Otan) et le Japon (qui n’est pas membre de l’Alliance atlantique) se sont rangés aux côtés des États-Unis, du Canada, de la Grande-Bretagne, de l’Italie et de la République fédérale d’Allemagne (RFA). La notion de sécurité occidentale est ainsi considérée comme débordant du cadre atlantique, ce qui pourrait constituer un facteur nouveau dans le problème, posé depuis quelques semaines, d’une sorte d’association, dont les formes juridiques restent à étudier, du Japon aux travaux de l’Otan – problème auquel le Japon souhaiterait qu’une solution positive fût apportée en raison des menaces que les SS-20 installés dans certaines zones asiatiques de l’URSS font peser sur lui.
L’affrontement monétaire ne s’est pas produit, sans doute parce que les présidents Reagan et Mitterrand savent qu’il est difficile de concilier des politiques monétaires qui traduisent des logiques économiques différentes, sans doute aussi parce qu’ils ne se font pas d’illusions sur les délais dans lesquels pourrait être bâti un nouveau système monétaire international. Si, en juillet 1944, la Conférence de Bretton-Woods ne dura que trois semaines, elle était la conclusion de deux années de travaux. On pensait alors que l’URSS s’associerait aux efforts engagés pour assurer une paix solide. Or, considérant les principes directeurs de Bretton-Woods comme inspirés par l’« esprit capitaliste », elle refusa de devenir membre du Fonds monétaire international (FMI). Celui-ci avait en outre un droit de regard sur certains éléments de la politique monétaire, ce que Moscou estimait incompatible avec sa souveraineté nationale. Le refus de bénéficier du plan Marshall en 1947 n’a été ainsi qu’une suite logique du refus de devenir membre du FMI en 1944. La réorganisation des économies ruinées par la guerre ne put s’effectuer dans un cadre mondial, et, aujourd’hui encore, les pays non communistes doivent envisager la réforme du système monétaire international en sachant que l’URSS ne s’associera pas à leurs efforts, et même qu’elle se dressera contre eux dans certains domaines, notamment pour ce qui concerne les rapports entre les pays industrialisés et les pays en voie de développement.
L’OUA en quête d’un nouvel avenir
Tandis que se poursuivaient les discussions préparatoires à ce « Sommet » de Williamsburg, l’attention se portait, une nouvelle fois, sur l’Afrique. C’est qu’en effet l’OUA – Organisation de l’unité africaine – qui se veut la tribune politique du continent africain, a fêté le 25 mai 1983 ses vingt ans d’existence en traversant la crise la plus grave de son histoire. Elle reste en Afrique le seul forum des dialogues panafricains. Mais parce qu’elle n’a pas su trouver de solution « africaine » aux conflits politiques et militaires qui s’y déroulent, l’ombre des puissances occidentales, de l’URSS et de ses alliés se profile en Afrique australe, dans la Corne de l’Afrique, au Tchad et au Sahara occidental. Après deux tentatives de réunion avortées en 1982 – la question sarahouie et celle du Tchad divisaient alors ses membres en deux camps – un nouveau rendez-vous avait été pris à Addis-Abeba du 6 au 11 juin 1983. Mais, début juin, nul ne pouvait assurer que la réunion aurait lieu, encore que, le 22 mai, le président en exercice. M. Arap Moi, avait précisé que « les partisans d’un report et ceux qui posaient des conditions sont devenus minoritaires ». La réunion de novembre 1982 avait achoppé sur la question de la représentation tchadienne, le colonel Kadhafi ayant contesté (et contestant toujours) la légitimité du gouvernement de M. Hissène Habré (Tchad). Mais, depuis, le colonel Kadhafi a subi deux échecs ; à Bangui, le président Kalingba a exigé le départ quasi immédiat du petit contingent militaire libyen qui était en place depuis huit mois et, à Ouagadougou (Haute-Volta) [Burkina Faso], l’un des hérauts de la Libye, le capitaine Sankara, a été arrêté, ce qui a porté un nouveau coup à l’idée d’un Sahel arabo-musulman. Ceci est d’autant plus important que le colonel Kadhafi, qui soutient le POLISARIO (qui effectua son premier raid contre El-Khanga, au Maroc, le 20 mai 1973) ne cachait pas ses préoccupations devant l’éventualité d’un rapprochement de l’Algérie avec le Maroc et la Tunisie. Le processus de normalisation engagé entre Rabat et Alger par la rencontre entre le roi Hassan II et le président Chadli le 26 février ne s’est pas développé comme certains l’imaginaient. Le problème du Sahara occidental n’est toujours pas réglé. L’Algérie (qui aide le POLISARIO) serait prête à offrir ses bons offices si l’on reconnaissait à Rabat que le conflit oppose non le Maroc et l’Algérie, mais le Maroc et la République arabe sarahouie, ce qui équivaudrait à conférer à celle-ci la valeur d’une réalité juridique, ce que conteste Rabat. Derrière cette suggestion algérienne se profile l’idée d’un « Grand Maghreb arabe », qui a de fervents partisans à Alger et à Tunis (voir Pierre Rondot : « Tunisie et Grand Maghreb arabe », Défense Nationale, juin 1983).
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