Défense dans le monde - Le potentiel militaire soviétique
Près de dix-huit mois après avoir publié la première édition du Soviet Military Power, le gouvernement américain vient de faire paraître une seconde version qui constitue une mise à jour de l’évaluation de la menace militaire soviétique par les États-Unis, et son évolution depuis la fin de 1981.
L’analyse qui suit, se propose de faire ressortir les éléments significatifs du document.
En premier lieu, il convient de rappeler les innovations majeures survenues depuis plus d’un an. Dans les forces stratégiques, deux nouveaux missiles intercontinentaux ont été testés, tandis qu’un bombardier à long rayon d’action, le Tu-160 Blackjack, plus important que le Rockwell B-1 Lancer américain a effectué ses premiers vols d’essai. Un deuxième sous-marin nucléaire lance-engins de 25 000 tonnes de la classe Typhon dont les missiles actuellement en expérimentation seront capables de frapper des objectifs à environ 8 300 kilomètres, a été lancé. Enfin, une nouvelle génération de missiles de croisière à tête nucléaire d’une portée supérieure à 1 600 km fait l’objet de vols d’essai.
Dans les forces terrestres, les divisions soviétiques stationnées en Europe de l’Est voient leur capacité nucléaire s’accroître avec l’arrivée du système d’armes SS-21, en remplacement du Frog (roquette non-guidée tout-terrain), et de l’automoteur de 152 millimètres à capacité classique, chimique et nucléaire. La restructuration des divisions et la réorganisation de l’artillerie des niveaux front et armée se poursuivent et se traduisent par une augmentation de 30 % de la puissance de feu des grandes unités. L’introduction du nouveau char de bataille T-80 a débuté dans les unités blindées soviétiques tant en URSS qu’en Europe Orientale.
Dans cette évolution générale, les forces navales ne restent pas en retrait, puisqu’un quatrième porte-aéronefs de la classe Kiev (37 000 t) a été lancé et que se poursuit la construction d’un véritable porte-avions de plus gros tonnage.
Dans les chantiers navals de la Baltique et de la mer Noire, l’exécution du programme portant sur quatre nouveaux types de bâtiments de surface continue, de même qu’une nouvelle génération de croiseurs et destroyers lance-missiles, à propulsion nucléaire et classique. Enfin un deuxième sous-marin d’attaque classe Oscar de 14 000 t est en cours de développement.
Parallèlement à cet effort de modernisation, l’URSS entretient en Afghanistan un corps de bataille porté maintenant à plus de 105 000 hommes.
En dépit de ses difficultés économiques, l’Union soviétique maintient la priorité accordée aux investissements de défense. Les dépenses afférentes à ses forces armées, représentent 15 % de son PNB (produit national brut) et marquent une augmentation de 12 à 14 % par rapport à 1981.
Par sa présentation le Soviet Military Power 1983 complète la version précédente sur de nombreux points.
Sans revenir sur les questions d’organisation ou de structures qui n’évoluent que lentement, la nouvelle brochure fournit une approche un peu différente de la puissance militaire soviétique ; on y relève une description sommaire de la composition des forces du Pacte de Varsovie sur les divers théâtres d’opérations, une énumération des domaines sur lesquels portent essentiellement les transferts de technologie et une série d’exemples de production militaire assurée par les industries relevant de ministères civils. Il n’est pas inintéressant notamment de savoir que la construction des véhicules chenilles de transport de personnels, des véhicules tout chemin ou de reconnaissance et des pièces d’artillerie est assurée par le ministère de la Construction des tracteurs et de machines agricoles.
Que conclure de cette nouvelle présentation de la puissance militaire soviétique ? En premier lieu, les rédacteurs ont tenu compte des critiques majeures qu’avait suscitée l’édition de 1981, à savoir l’absence de toutes références aux forces de l’Otan ce qui interdisait des comparaisons entre les deux Alliances. En incluant des données comparatives qui permettent de situer les efforts respectifs de l’URSS et de l’Otan, les responsables de Washington ont démontré, chapitre après chapitre, que les Soviétiques détenaient désormais la supériorité sur les États-Unis et ses alliés dans presque tous les domaines, et bien entendu dans celui des forces stratégiques.
Il n’y a pas de raisons particulières de douter des estimations américaines qui n’ont en outre jamais été démenties par la partie soviétique. Tout au plus doit-on rappeler que l’équilibre des forces présentées dans la brochure fige une situation à un moment donné alors que les divers programmes d’armement pris en compte pour chaque camp ne sont que rarement à un même stade de développement.
Base de données numériques intéressantes et de réflexions, le Soviet Military Power attend maintenant sa contrepartie soviétique un kto ugrazhayet miru (qui menace la paix) version 1983. ♦