Mauritanie et Adrar
Cette série de notes, prises au jour le jour, pendant la préparation, puis au cours de la conquête de l’Adrar, constituent une des pages de la longue et glorieuse carrière coloniale du général Gouraud. Les tribus maures du Nord du Sénégal, sous l’obédience des fils de Ma el Aïnin, s’opposent à notre pénétration et pillent sans discontinuité ceux qui se sont soumis à la France ; la mort de Coppolani a porté un coup sensible à notre prestige et les tribus ralliées demandent du secours.
Gouraud, jeune lieutenant-colonel, connu par ses campagnes du Soudan et du Tchand, est désigné pour prendre le commandement de la Mauritanie dans ces circonstances difficiles. Appuyé par le gouverneur général Merlaud-Ponty, le nouveau Commissaire de la République prépare dans les moindres détails cette opération délicate : organisation de la troupe, création de méharistes, préparation politique, sont poussées avec le même soin. Les rezzous maures marquent quelques succès au début. Repoux et Georges Mangin sont tués, mais bientôt vengés. Il faut suivre en détail les dures privations, les étapes sans eau, la perpétuelle angoisse des détachements isolés, les convois retardés, les vivres rares, les pertes des meilleurs, pour saisir l’énergie du chef, sa persévérance, sa volonté sans défaillance.
Les combats sont durs, avec de petits effectifs sénégalais mal habitués au désert contre un ennemi nombreux, bien armé, fanatisé et exploitant à fond ce pays aux ressources rares. Enfin, le but est atteint et le poste d’Atar installé. C’est alors la période des palabres amenant les soumissions et, par contrecoup, la nécessité de protéger les nouveaux soumis ; les randonnées pour poursuivre les djouch qui se dérobent, la mauvaise foi de certains. Les pertes sont peu nombreuses, mais les meilleurs succombent. La Métropole s’affole et le Gouvernement veut faire évacuer l’Adrar : encore une fois, cette colonie sera conservée malgré les Pouvoirs publics. Gouraud rentre en France en s’arrêtant au Maroc pour tenter d’arrêter la contrebande d’armes. Le colonel Claudel lui succède en Adrar mais la pacification ne sera complète que beaucoup plus tard, après la création du poste d’Idjil et la liaison effective avec le Sud marocain, avec les blindés de Trinquet et de Giraud. Poésie et mirage du désert, mépris du confort, exemple d’énergie continue, ardente foi dans la grandeur de l’œuvre coloniale de la France, telles sont les caractéristiques de ces pages qui, une fois de plus, situent le grand soldat qui n’a eu qu’une devise « servir ».