Diplomatique - Du Komintern au Kominform - Les travaux de l'ONU - Les troubles de l'Inde
Il ne faut pas sous-estimer l’importance de la décision qu’ont prise les partis communistes de neuf pays européens, tendant à mettre en commun leurs informations et à coordonner leurs efforts ; mais il ne conviendrait pas non plus de regarder l’initiative dont Moscou s’est avisé comme l’indice d’un changement radical dans la politique extérieure de l’Union soviétique. Certes, l’apparence est trompeuse et l’on peut tirer argument du fait qu’après avoir dissous la Troisième Internationale au mois de mai 1943, Staline la reconstitue au mois d’octobre 1947.
Le 18 janvier 1938, un jeune communiste russe, nommé Ivanov, avait écrit à Staline pour le faire juge du différend qui s’était élevé entre lui et son camarade Ourojenko, touchant l’interprétation du programme de Lénine. Ivanov avait soutenu « qu’on ne peut obtenir de victoire définitive qu’à l’échelle mondiale, et par les efforts conjugués des ouvriers de tous les pays ». Sur quoi Ourochenko l’avait traité de trotskiste, déclarant que, selon Staline, l’anéantissement du régime bourgeois et la création d’un État socialiste en Russie étaient bien une victoire définitive. Staline répondit, le 12 février suivant, par une longue lettre, qu’il est intéressant de relire aujourd’hui. Il donne raison à Ivanov ; mais, dans la question posée, il distingue deux aspects. Le premier concerne les problèmes intérieurs : rapports entre les classes en Russie soviétique ; sur ce terrain, aucun doute n’est permis. « Nous possédons – écrit Staline – tout ce qui est nécessaire pour édifier une société socialiste intégrale. Donc nous pouvons, et nous devons, par nos propres forces, abattre notre bourgeoisie et édifier chez nous la société socialiste. » C’est pour avoir méconnu cette possibilité et ce devoir que Trotsky, Zinoviow, Konienef, etc. furent taxés d’hérésie et exclus du Parti.
Mais il faut considérer un autre aspect, celui du problème extérieur. Après avoir instauré chez elle le régime socialiste intégral, la Russie est-elle suffisamment garantie contre le péril d’une intervention militaire et d’un effort de l’étranger pour restaurer chez elle le régime capitaliste ? À cette question, Staline répond : « Non ! » Et non seulement le problème extérieur n’est pas résolu, mais il ne peut pas l’être par la seule force du peuple russe. D’où il conclut que la victoire n’est pas définitive tant qu’elle n’est pas garantie. Mais il ajoute : « On ne peut résoudre le second problème qu’en conjuguant les efforts sérieux du prolétariat international avec ceux, encore plus sérieux, du peuple soviétique tout entier. Il faut rendre plus forts et plus solides les liens qui unissent la classe ouvrière de l’URSS et la classe ouvrière des pays bourgeois ; il faut organiser l’aide politique de la classe ouvrière des pays bourgeois à la classe ouvrière de notre pays en cas d’une agression militaire contre celui-ci ; et il faut organiser une aide efficace de la classe ouvrière de notre pays à celle des pays bourgeois. Il faut renforcer notre armée, notre flotte, notre aviation… il faut tenir tout notre peuple en état de mobilisation, pour qu’il soit prêt à faire face au danger d’une agression militaire et pour qu’aucune manœuvre de nos ennemis extérieurs ne puisse nous prendre au dépourvu. »
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