Les mers de l’Extrême-Orient sont sources de conflits potentiels pour leur contrôle. La Chine, dont la marine est en pleine expansion, en revendique une souveraineté qui remet en cause les principes classiques du droit de la mer, suscitant une inquiétude croissante parmi les pays de cette région, nouveau centre de gravité de l’économie-monde.
Droit de la mer et conflits maritimes en Extrême-Orient (2/2) (T 1094)
Law of the Sea and Martime Conflicts in the Far East(2/2)
The seas of the Far East are sources of potential conflicts for their control. China, whose navy is expanding, claims sovereignty that challenges the classical principles of the law of sea, raising growing concern among the countries of this region, a new center of gravity for the world economy.
Quatre préalables juridiques sont tout d’abord à prendre en considération pour un règlement des conflits de souveraineté. Le premier renvoie aux principes de la Charte des Nations unies selon lesquels : les États doivent régler leurs différends par des moyens pacifiques (art. 2 § 3) – les acquisitions de territoires par la force sont illégales et ne peuvent donc fonder un titre juridique (art. 2 § 4). Le second préalable renvoie aux disputes sur le bien-fondé de l’utilisation de la notion de droits historiques. Il en est notamment ainsi lorsqu’ils se fondent sur la notion de « temps immémoriaux » et, d’autre part, lorsqu’ils visent non pas à une portion mais quasiment toute la mer de Chine méridionale au moyen du tracé dit de la Langue de bœuf. En troisième lieu, tant l’établissement que le maintien d’un titre territorial requiert la preuve de l’effectivité de l’autorité et de l’administration d’un État de manière paisible et dans la durée. Le quatrième préalable est qu’il ne peut y avoir de recours à une juridiction internationale que si les parties au litige y consentent. Or, ce principe se heurte à la culture régionale qui considère souvent que le règlement d’une question de souveraineté ne peut, par principe, être dévolu à un tiers.
Par ailleurs, il convient d’avoir également à l’esprit que les litiges relatifs aux questions de souveraineté insulaire ne sont qu’indirectement maritimes. Ils sont maritimes parce que le droit international de la mer a donné aux îles une capacité à produire des effets juridiques à travers la possibilité d’y agréger une mer territoriale (MT), une Zone économique exclusive (ZEE) et un Plateau continental (PC). Ils ne le sont toutefois qu’indirectement dans la mesure où il s’agit au fond de conflits de souveraineté territoriale. Pour prévenir la tendance à donner le statut d’île à toute formation géomorphologique présentant peu ou prou un caractère insulaire, le droit international de la mer a défini plus strictement le bénéfice du statut insulaire en précisant qu’il correspond aux formations présentant notamment un minimum de viabilité humaine et économique afin d’écarter de la catégorie les simples rochers ou bandes de terre affleurant les eaux. La Convention de 1982 précisa ensuite la norme applicable en précisant que le substrat d’une île ne pouvait être composé de matériaux provenant de l’activité humaine.
En Extrême-Orient, les conflits insulaires des États de la région portent principalement sur la question de la souveraineté sur les îles Diaoyu, Paracels et Spratley. Le différend relatif à la souveraineté sur les îles Diaoyu situées entre les îles japonaises Ryukyu et Taïwan oppose la République populaire de Chine (RPC) au Japon depuis le début des années 1970 suite à leur rétrocession par les États-Unis au Japon et à la découverte quasi simultanée d’indices de gisements de pétrole dans la zone. Géographiquement adjacentes aux côtes de Taïwan, ces îles forment un archipel composé de 5 petites îles et de 3 rochers. Sur le fondement des critères d’adjacence et de droits historiques, c’est Taïwan qui a pris l’initiative du litige en déclarant simultanément sa souveraineté sur les ressources du plateau continental de la zone et sa décision de les exploiter en accordant des licences d’exploitation à 4 sociétés étrangères. La protestation japonaise a été immédiate et s’est traduite par des actions menées à l’encontre de pêcheurs taïwanais exerçant leurs activités dans la zone. Puis la RPC a déclaré également sa souveraineté le 29 décembre 1971 en tant que gouvernement central de la Chine, l’autorité de Taïpei étant alors juridiquement assimilée à celle d’un simple gouvernement local. En fait, l’origine de ce différend remonte à la fin du XIXe siècle lorsque le Japon a annexé les îles Diaoyu. En la matière, la thèse japonaise met aujourd’hui en avant le caractère res nullius de ces îles avant cette annexion, leur découverte par un Japonais et le caractère effectif de leur occupation depuis. La thèse chinoise considère, à l’inverse, que la Chine exerce depuis 1372 un titre historique sur ces îles qui se fonde sur leur découverte et leur utilisation par les marins chinois et leur rattachement à Taïwan.
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