Mahomet a été à la fois un chef religieux, politique et militaire. Ce dernier volet est souvent peu connu mais il a été incontournable pour permettre au Prophète d’imposer son autorité. Selon les sources historiques, il sut créer une unité de commandement autour de sa figure, obligeant les tribus nomades à accepter d’être loyales, il valorisa l’expérience du combat pour se constituer une hiérarchie fidèle et il prit soin de la logistique de ses hommes, évoluant dans un environnement hostile. Ces facteurs contribuèrent à son succès et à la pérennité de son action.
Mahomet à l’origine d’une révolution stratégique ? Éléments pour une approche stratégique transculturelle (T 1138)
Mehari (Erica Guilane-Nachez)
Muhammad was simultaneously a religious, political, and military leader. This last part is not often well known, but it was essential to allow the Prophet to impose his authority. According to historical sources, he knew how to create a unity of command around his figure, forcing the nomadic tribes to accept to be loyal, he valued the combat experience to constitute a loyal hierarchy and he took care of the logistics of his men, evolving in a hostile environment. These factors contributed to its success and the sustainability of its action.
Pour appréhender avec clarté la façon dont Mahomet (ou Mohammed) a révolutionné l’organisation militaire de son époque, nous proposons d’analyser les trois principales transformations qui lui sont dues : le changement des systèmes de loyautés au sein de l’armée, les apports du Prophète dans le champ de la logistique, et la mise en place de nouvelles sources de motivation.
Le changement des systèmes de loyautés au sein de l’armée
Mahomet a su mettre ensemble les armées des Bédouins et celles des notables des villes. Les armées des Bédouins reposaient sur sa cavalerie (chameaux) extrêmement rapide et agile. Elles étaient habituées à effectuer des opérations techniques pensées pour provoquer la surprise de l’ennemi et le mener dans des embuscades. L’infanterie des villes arabes reposait surtout sur le nombre des hommes disponibles. Quelques grandes villes les plus riches avaient des chevaux mais les régiments d’unités montées étaient trop petits et donc inefficaces. L’infanterie et la cavalerie répondaient à deux logiques assez différentes : les Bédouins étaient considérés comme très efficaces pour leur capacité de mouvements rapides notamment sur les flancs de l’armée qu’ils pouvaient ainsi protéger mais également comme peu disciplinés – ils ne respectaient pas d’autre loyauté que celle de leur clan. L’infanterie était considérée, quant à elle, comme plus fiable car habituée à vivre dans une hiérarchie guerrière précise et à se battre pour défendre sa ville, mais aussi les villes alliées. Par contre, elle était beaucoup plus lente que la cavalerie et se trouvait souvent dépassée lorsqu’elle devait se battre contre cette dernière. Chaque type d’unité avait les avantages que l’autre n’avait pas. La capacité d’unir ces deux types d’unités correspondait à bien plus qu’une réforme technique : Mahomet proposait un modèle de société, l’Oumma, qui imposait de dépasser les divisions claniques et les loyautés de sang de la société traditionnelle arabe. Cette transformation du système de loyauté est évidemment liée à la modification des référents en ce qui concerne l’autorité légitime.
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