Sans cesser d’interagir avec ses partenaires et de contribuer à un ordre mondial multilatéral, l’Union européenne devrait développer une capacité d’action indépendante dans un certain nombre de domaines stratégiques. Cette contribution se veut complémentaire à la réflexion sur la construction d’une défense européenne.
Il est temps de construire l’indépendance stratégique européenne (T 1171)
Le siège de la Commission européenne, à Bruxelles. Photo : doganmesut
Without stopping to interact with its partners and to contribute to a multilateral world order, the European Union should develop a capacity for independent action in a number of strategic areas. This contribution is intended to complement the reflection on the construction of a European defense.
En temps de crise sanitaire et économique, l’accès à certaines ressources est un enjeu vital. La ruée vers les matériels médicaux nécessaires à la lutte contre le coronavirus – masques, respirateurs et autres – donne lieu à des pratiques agressives entre puissances compétitrices et même entre puissances alliées (1). Cette situation de manque, de « stress », sur des ressources fabriquées en quantité insuffisante sur notre sol, met en lumière l’une des vulnérabilités de nos sociétés : le fait d’être à la merci d’intérêts qui ne sont pas les nôtres. Si cette dépendance peut passer inaperçue en temps d’abondance, elle se fait cruellement ressentir en temps de pénurie. Sommes-nous conscients de cette vulnérabilité ? Et comment nous en affranchir ?
De l’indépendance stratégique
Dans les années 1960, le général de Gaulle prônait l’indépendance comme un refus de toute sujétion vis-à-vis des puissances étrangères (2). Ce souci politique motiva le lancement d’une capacité propre de dissuasion et de renseignement, mais aussi de grands chantiers industriels dans les secteurs du nucléaire, de l’Espace, de l’aéronautique, de l’électronique ou encore de l’informatique (3). Ce dirigisme répondait à une exigence : avoir « les mains libres ».
Il reste 91 % de l'article à lire