Analyser le monde pour essayer de mieux le comprendre, telle est l’ambition des différents annuaires et atlas stratégiques publiés régulièrement à l’automne, offrant un panorama très complet des déchirures actuelles. Le premier texte porte sur les annuaires proposés par les différents think tanks français. Avec comme point commun, l’incertitude face à la pandémie de la Covid-19 apparue l’hiver dernier d’abord en Chine puis ayant disséminé sur pratiquement toute la planète avec ses cortèges de malades et hélas de morts. Et de fait, le tempo de la rédaction de ces ouvrages a fait qu’ils s’interrogent face aux conséquences alors même que la deuxième vague de cet automne n’avait pas encore frappé. De cette ambiance délétère, les relations internationales en ont pâti avec d’une part l’égoïsme des Nations et d’autre part la crise économique qui s’ensuit. La pandémie a finalement accéléré les ruptures et les bouleversements en cours, accroissant l’incertitude stratégique.
Parmi les annuaires et les atlas stratégiques 2021 - Le grand basculement (1/5) Panorama du monde contemporain à l’été 2020 (T 1224)
@ Nataly-Nete
Analyzing the world to try to understand it better, such is the ambition of the various directories and strategic atlases published regularly in the fall, offering a very comprehensive overview of current heartbreaks. The first text concerns the directories offered by the various French think tanks. With one thing in common, the uncertainty in the face of the Covid-19 pandemic which appeared last winter first in China and then having spread over practically the entire planet with its processions of sick people and unfortunately of deaths. And in fact, the tempo of the writing of these books made them wonder about the consequences even though the second wave of this fall had not yet struck. From this deleterious atmosphere, international relations have suffered with on the one hand the selfishness of Nations and on the other hand the ensuing economic crisis. The pandemic has ultimately accelerated the ongoing disruptions and upheavals, increasing strategic uncertainty.
Introduction
La pandémie de la Covid-19, par sa soudaineté, sa diffusion planétaire, toutes les incertitudes dont elle reste entourée, son impact sanitaire, encore plus économique, mais aussi social et psychologique, sans rien dire à ce stade de ses répercussions stratégiques, représente un phénomène unique qui, apparemment, défie toute analyse. On peut même dire, sans forcer le trait, qu’elle a déclenché chez certains milieux le Weltschmerz, la « difficulté d’exister au monde », ce qui pose la question de la sécurité, entendue dans son sens le plus large. De ce fait, partout dans le monde, la pandémie a marqué le retour de l’État, en testant notamment sa capacité à instaurer l’État d’exception. Les pandémies, comme les guerres, sont des moments au cœur de la construction de l’État. Par ailleurs, il convient d’admettre que la métaphore guerrière est historique dans le domaine de la santé publique : cordons sanitaires, quarantaines, couvre-feu sont bien des expressions à usage dual.
Pour l’analyse de cette catastrophe, si les points de comparaison avec les autres crises globales ne manquent pas, comme s’y livre avec brio Thierry de Montbrial (cf. infra), c’est le recul qui fait défaut et l’avenir qui reste incertain. Pourtant, on trouvera maintes analyses d’envergure dans les différents annuaires stratégiques qui, chacun à leur façon, se sont livrés à un travail minutieux d’analyse et de prospective. S’il est un aspect sur lequel insistent toutes ces utiles synthèses, en dehors du défi qu’a représenté la pandémie pour l’Union européenne dont elle a durement éprouvé la résilience, c’est l’accentuation de l’affrontement sino-américain qui revêt bien des aspects d’une guerre froide 2.0 (voir 5e partie). Déjà, on se rappellera, en juillet 2019, Thierry de Montbrial dans ses « Perspectives », avait développé l’idée selon laquelle la compétition sino-américaine serait le facteur structurant des prochaines décennies, phénomène que l’on peut analyser comme un affrontement entre deux empires. Toutefois, bien d’autres problèmes nous intéressent au premier chef, comme l’avenir de la vaste zone du Moyen-Orient (4e partie) – emplie de convulsions – et, bien entendu, les questions climatiques et celles de la biodiversité (3e partie), ainsi que l’immense domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC).
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