La question des épaves sous-marines a été très longtemps négligée sous l’angle de la pollution. Hormis les chasseurs d’épaves – pour y trouver des trésors souvent fantasmés –, les autorités ne se préoccupaient que de celles pouvant présenter une entrave à la navigation. Depuis peu, il y a une prise de conscience du risque de pollution résiduelle pouvant causer des dommages irréversibles à l’environnement marin. Toutefois, les contraintes techniques donc coûteuses de récupération de résidus polluants limitent drastiquement les possibilités de réduire ces atteintes aux écosystèmes naturels.
La bombe à retardement des épaves sous-marines (T 1230)
USS Arizona Memorial (vue aérienne)
The question of underwater wrecks has been neglected for a very long time from the angle of pollution. Apart from wreck hunters - to find often fantasized treasures - the authorities were only concerned with those that could present an obstacle to navigation. Recently, there has been an awareness of the risk of residual pollution that can cause irreversible damage to the marine environment. However, the costly technical constraints of recovering polluting residues drastically limit the possibilities of reducing these attacks on natural ecosystems.
On connaît la pollution plastique qui ravage nos mers et océans, mais il en existe une autre bien plus pernicieuse. Au large des côtes du monde entier reposent des milliers d’épaves (navires de guerre, cargos, pétroliers, chimiquiers…) qui contiennent toujours des produits potentiellement dangereux. Cela peut être leur cargaison ou, plus fréquemment, les combustibles et ingrédients nécessaires au fonctionnement des machines. Au fil du temps, et sous l’effet conjugué de la corrosion et des courants, ces épaves se fragilisent et peuvent libérer leur contenu dans l’environnement marin. Les scientifiques tirent la sonnette d’alarme et pressent les États d’agir face à « ces bombes à retardement écologiques ».
Les épaves maritimes : un phénomène loin d’être anecdotique
Un navire qui coule à la suite d’un échouement, d’une cassure, d’un abordage ou de tout autre incident emporte avec lui une quantité variable d’hydrocarbures de natures diverses : fioul de propulsion, diesel pour groupes électrogènes, huiles mécaniques… Peu ou pas biodégradables, ces substances sont destinées à s’échapper tôt ou tard de l’épave, en migrant vers le haut à travers les déchirures liées au naufrage ou celles qui apparaîtront avec le vieillissement de la coque. Les volumes en jeu peuvent atteindre plusieurs milliers de tonnes pour un porte-conteneurs géant de dernière génération. Lorsque l’embarcation est parfaitement stabilisée, à une profondeur où la houle est limitée, les premiers suintements peuvent ne commencer que trente à cinquante ans plus tard et rester masqués par d’autres déversements en mer, notamment les déballastages. Un « issue paper » intitulé « Potentially polluting wrecks in marine waters » et rédigé sous la houlette d’un comité de pilotage international a identifié quelque 8 569 épaves potentiellement polluantes dans le monde dont 1 583 pétroliers avec des quantités allant, selon les évaluations, de 2,5 millions à 20 M de tonnes dans leurs soutes (1). À titre de comparaison, lors de la catastrophe de l’Exxon Valdez au large de l’Alaska en 1989, la pire marée noire américaine, « seulement » 39 000 tonnes de fioul lourd s’étaient déversées en mer (2).
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