La Corée du Nord conduit une politique autarcique revendiquée par le régime. Cependant, celui-ci s’est toujours efforcé de trouver des biais pour alimenter ses besoins, en particulier ceux de la dynastie des Kim. Le Bureau 39 – une forme de service secret – est l’outil permettant clandestinement de procurer notamment les devises finançant les programmes dirigés par Kim lui-même. Cela va des produits de luxe aux armements nucléaires, en utilisant toutes les ressources clandestines possibles sur les marchés.
Le Bureau 39 et les fonds secrets de la Corée du Nord (T 1252)
North Korea conducts an autarkic policy claimed by the regime. However, he always tried to find ways to feed his needs, especially those of the Kim dynasty. Office 39 - a form of secret service - is the tool for clandestinely obtaining the currencies in particular to finance the programs directed by Kim himself. This ranges from luxury goods to nuclear armaments, using all possible clandestine resources in the markets.
La Corée du Nord, qui possède l’un des PIB par habitant parmi les plus faibles de la planète (1 800 dollars, au niveau de Haïti), est aujourd’hui la puissance nucléaire la plus pauvre du monde (1). Le régime des Kim, visé par les mesures économiques à répétition du Conseil de sécurité de l’ONU, est aussi l’État le plus sanctionné au monde. Pourtant, rien ne semble en mesure de freiner les progrès fulgurants de son programme nucléaire. En janvier dernier, Pyongyang a dévoilé un nouveau type de missile balistique déployable depuis un sous-marin, ce qui accréditerait la thèse du développement d’une nouvelle composante de sa dissuasion nucléaire, en complément de la terrestre (2). Dès lors, comment la Corée du Nord, étranglée financièrement, peut-elle poursuivre avec autant de succès ses ambitions militaires ? Une organisation gouvernementale secrète, baptisée Bureau 39, serait spécialement chargée d’alimenter les caisses noires du régime. Elle est régulièrement accusée d’avoir une part active dans la traite d’esclaves, le trafic d’armes et de contrefaçons, notamment de cigarettes et de billets de banque, mais aussi de brevets technologiques. Ces pratiques illicites pourraient rapporter plus d’un milliard de dollars par an à la dictature nord-coréenne (3).
Le mystérieux « Bureau 39 »
Régulièrement cité par des transfuges nord-coréens, le Bureau 39 aurait été fondé à la fin des années 1970 par Kim Jong-il et Kim Il-sung, respectivement le père et le grand-père de l’actuel dirigeant Kim Jong-un. Grâce à une fuite de données numériques survenue en 2007, son existence a pu être prouvée et même détaillée. Il serait notamment divisé en six services administratifs et compterait plusieurs milliers d’employés triés sur le volet. En pratique, ses missions sont d’assurer une base de pouvoir indépendante pour la famille Kim, mais aussi de collecter des devises fortes pour la bombe nucléaire et les goûts de luxe des dirigeants du pays.
Pour ce faire, les membres du Bureau 39 ont développé toute une myriade d’activités inusuelles, voire carrément illicites. Au début, il s’agissait de pratiques conduites avec pas mal d’imagination, mais une bonne dose d’amateurisme par les représentations diplomatiques nord-coréennes à travers le monde. On ne compte d’ailleurs plus les circonstances dans lesquelles un fonctionnaire d’une ambassade nord-coréenne a été compromis dans un trafic d’alcool, de cigarettes ou de fausse monnaie. Cependant, à partir des années 2000, face à la pression grandissante des sanctions onusiennes, elles ont pris une tournure plus professionnelle, plus inquiétante. « La mafia italienne, même à son pic d’activité dans les années 1970-1980, n’a jamais atteint un tel degré de sophistication, ni une telle envergure mondiale » confie ainsi Joseph Fitsanakis, professeur de sciences politiques à l’université de Coastal Carolina (États-Unis) (4). Actuellement, « 70 à 80 % des devises récoltées par la Corée du Nord, le sont de manière illégitime et illégale », ajoute-t-il.
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