Alors que l'US Air Force a annoncé que les derniers B-1B Lancer seront retirés du service en 2032, rien n’augure la moindre éclaircie diplomatique entre les États-Unis et ses principaux rivaux (Russie et Chine, voire Iran ou Corée du Nord). D'ailleurs, les mêmes appareils viennent de participer à un exercice de l'Otan en Norvège en y étant, grande première, basés. La guerre froide n'est pas loin…
Les B-1B Lancer de l’US Air Force : manœuvre guerre froide dans les neiges de l’Arctique (T 1265)
Un B-1B Lancer sur la base de Bodø en Norvège (© Norwegian Defense Forces)
While the US Air Force has announced that the last B-1B Lancers will be retired from service in 2032, nothing bodes well for any diplomatic thinning between the United States and its main rivals (Russia and China, or even Iran or North Korea). Moreover, the same devices have just taken part in a NATO exercise in Norway by being based there, a great first. The cold war is not far away...
L’annonce officielle de l’US Air Force (USAF) portant sur le retrait de 17 bombardiers Rockwell B-1B Lancer des lignes de vol de l’US Global Strike Command (USGSC), sonne à contre-cycle. Alors qu’une nouvelle administration a pris ses quartiers à Washington, rien n’annonce la moindre éclaircie diplomatique entre les grandes capitales en postures de rapports de force. La décision de retrait a été prise par un National Defense Authorization Act (1) le 18 février. Pour le général Timothy Ray, commandant de l’USGSC, ce retrait ne vient en rien entamer les capacités de frappe de son commandement. Les capacités militaires de l’avion se voient augmentées par l’intégration de nouveaux armements. Au même moment, l’USAF annonce un exercice de projection de 4 avions, en Norvège, aux marges des frontières de la Russie. L’information de l’Otan, n’a pas échappé à Sputniknews (2). Pour le B-1, poser les roues en Norvège fut une première.
Message de dissuasion sur la région nord de l’Otan
Par son aspect de bombardier stratégique intercontinental, le B-1B constitue un geste fort dans les manœuvres de dissuasion, sans pour autant le faire entrer dans le registre nucléaire. Telle est l’interprétation que l’on peut proposer au déploiement tout récent des quatre B-1B Lancer sur la base de Ørland, en Norvège. Élément de pointe d’une campagne d’exercices auprès de l’Otan, ce déploiement inédit, depuis la base texane de Dyess Air Force Base (AFB), montre que Washington n’hésiterait pas à s’engager auprès de leurs alliés aux frontières de la pression militaire de Moscou. Appliqué à la zone arctique, le mot dissuasion est inscrit à la déclaration officielle du général Jeffrey Harrigan, commandant de l’USAF en Europe. Les avions ont également fait un passage en Pologne sur la base de Powidz au centre du pays et un déploiement très au nord de l’Otan sur la base de Bodø avec ses conditions climatiques extrêmes. Lorsque l’on regarde une carte de l’hémisphère nord, vue de Paris, la Scandinavie est au nord. La Terre n’étant pas un poster, vue de Washington ou de Moscou, cet ensemble régional, qui inclut l’Islande, le Royaume-Uni, la mer du Nord, les pays baltes, fait tampon avec la Russie de l’ouest de l’Oural, pile dans l’axe. L’arrivée des quatre avions fait écho à une nouvelle politique de renforcement des forces armées des pays baltes et nordiques. Parmi les signes les plus visibles, citons le projet en Finlande de constituer une nouvelle flotte d’avions de combat. La Suède modernise son arme blindée. Le Danemark se dote d’une marine océanique. Quant au Royaume-Uni, le parti pris, depuis quelques jours, est celui d’accroître son arsenal nucléaire qui passerait de 180 à 260 charges. Bref, la guerre froide reprend du service dans la zone nord et ses espaces enneigés. C’était plutôt sous les soleils bien plus chauds qu’elle déployait ses grandes ailes depuis trois décennies, dans les conflits régionaux consécutifs à la chute du mur de Berlin.
Action stratégique et armes conventionnelles
Au-delà du cercle polaire, ils ont réalisé des actions d’appui feu avec des avions de chasse F-16 danois et polonais et des SAAB Gripen suédois, au sol des obser-vateurs avancés Joint Terminal Attack Controller (JTAC) norvégiens. Pour l’US Air Force, le B-1 constitue l’instrument adéquat d’action lointaine et massive dans le registre conventionnel avec usage d’une vaste palette d’armes air-sol de précisions massivement délivrés sur l’adversaire. Par ses capacités de frappe et son rayon d’action, tout déploiement de B-1 porte un message politique. Sans attendre l’arrivée d’un porte-avions, il sait très vite délivrer une frappe depuis Continental United States, ou depuis son réseau de bases de contrôle stratégique : Mildenhall au Royaume-Uni, Incirlik en Turquie, Diego Garcia dans l’océan Indien, le Japon, ou la Corée du Sud, la Norvège s’ajoutant maintenant à la liste. Cette mission en Norvège reste toutefois conforme à la philosophie du « containment » propre à la diplomatie militaire américaine, ces appareils étant officiellement cantonnés aux frappes conventionnelles. Bien qu’il soit rattaché à l’USGSC, l’avion a abandonné depuis le traité Start II ses armes nucléaires (le traité est ratifié par le Congrès en 1996), laissant leur emploi aux B-52 Stratofortress et B-2 Spirit, et aux avions tactiques (A-10 Thunderbolt II, F-16 Fighting Falcon, F-15 Eagle et F-35 Lightning II). Dans cette vocation, l’apocalypse se logeait dans trois soutes à armement abritant aux choix : huit missiles de croisière AGM-86B, 24 engins Short Range Attack Missile (SRAM) AGM-69A à courte portée, 24 bombes à gravité B61 ou B83, ou bien encore une douzaine de B28 ou B43.
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