Analyser le monde pour essayer de mieux le comprendre, telle est l’ambition des différents annuaires et atlas stratégiques publiés régulièrement à l’automne, offrant un panorama très complet des déchirures actuelles.
Parmi les atlas et annuaires stratégiques 2022 - Au-delà de la Covid (2/3) (T 1337)
© Photocreo Bednarek, Adobe Stock
Analyzing the world to try to understand it better, such is the ambition of the various directories and strategic atlases published regularly in the fall, offering a very comprehensive overview of current heartbreaks.
En Russie « après la réforme constitutionnelle » (Tatiana Kastouéva-Jean), octroyant en théorie à la possibilité de Vladimir Poutine de rester au pouvoir jusqu’en 2036, la dérive « autoritaire » se poursuit constate Ramsès. Grâce essentiellement au savoir-faire de Poutine, la Russie a maintenu l’essentiel de ses positions sur la scène internationale. Elle a même consolidé son influence sur divers théâtres (Caucase, Asie centrale, Syrie, Afrique), renforcé ses liens avec la Chine et maintenu sa mainmise sur la Biélorussie. Les élections à la Douma ont fait suite à un contrôle très strict de l’espace politique national dont ont été exclus pratiquement tous les partis libéraux et les médias libres. Elles ont vu la victoire du parti gouvernemental « Russie unie » qui obtient la majorité constitutionnelle (2/3 des sièges), mais aussi la rentrée à la Douma, d’un 5e parti, première depuis 20 ans, signe de la montée du multipartisme en Russie. L’économie russe (Julien Vercueil), bien que n’ayant pas retrouvé sa robustesse d’avant 2014, a bien résisté à la crise, ses fondamentaux sont positifs, ses réserves financières en hausse. Seuls points noirs : montée de l’inflation, légère hausse du chômage, taux de pauvreté encore élevé. L’achèvement de la construction du gazoduc Nord-Stream II démontre que la Russie restera pour des décennies le principal fournisseur de l’or bleu de l’Europe (35 à 40 %).
Enfin, Moscou a procédé ces derniers mois à la modernisation profonde de son arsenal militaire se dotant d’armes souvent innovantes. Isabelle Facon l’analyse en montrant que la présence russe reste concentrée sur l’ex-URSS : en Géorgie et en Moldavie, où cette présence, qui pèse sur les options internationales de ces pays, n’est pas souhaitée (4e base en Ossétie du Sud, avec 3 500 hommes, 7e base en Abkhazie avec 3 500 h, force russe de 1 500 h en Transnistrie), en Arménie (202e base, 3 300 h), au Tadjikistan (201e base, 5 000 h) et au Kirghizstan (500 h). La Russie est en train d’achever un réarmement d’envergure, inédit depuis la chute du bloc soviétique, et décidé pour contrer l’armée américaine sur ses positions stratégiques. D’autres signes témoignent également de cette politique de réaffirmation militaire de la Russie : l’ouverture ou la modernisation de bases, les tests de nouveaux missiles et drones, des simulations d’attaques contre des sites occidentaux ou encore des déploiements maritimes et aériens de plus en plus lointains. Ainsi d’ici 2024, la part des armements modernes dans l’arsenal militaire devra atteindre 76 % (88 % pour la triade militaire). Le programme Poseidon 2M39, conçu pour contenir une ogive de plusieurs mégatonnes, rendant invivables des littoraux entiers pendant des décennies sera testé d’ici la fin de l’année. Le calendrier de la mise en service du drone de combat S-70 Okhotnik-B, alors en cours de développement chez Soukhoï, sera accéléré. Après des années de conceptions difficiles, le nouveau char de l’armée russe est enfin prêt à être produit en série : les derniers essais concernant l’Armata, au blindage très efficace, mais plus léger que ceux des chars classiques, lui permettant d’être plus maniable et surtout plus rapide auront lieu d’ici la fin de l’année et sa production débutera en 2022. La Russie a présenté son nouvel avion de chasse, le Soukhoï Su-75 Checkmate, le 21 juillet 2021 lors du salon aérien MAKS-2021, près de Moscou. L’appareil de 5e génération pourra larguer des drones et aura recours à l’IA.
Avec l’Union économique eurasiatique (UEE) se dessine peut-être la Grande Eurasie souhaitée par Moscou (David Teurtrie), celle-ci étant un multiplicateur de puissance et un instrument de coopération qui lui permet de mener un dialogue plus égalitaire avec la Chine et ses nouvelles routes de la Soie. Les Républiques d’Asie centrale doivent faire face à une série de défis (Michael Levystone), stratégie d’affirmation nationale et internationale propre dans des cadres politiques marqués par l’autoritarisme. Tous doivent composer avec un retour de l’islam, risquant d’être attisé par la victoire des Talibans, longtemps considéré comme un simple référent culturel, mais qui entretient des liens avec le djihadisme international. La Turquie, l’Iran, et surtout la Russie et la Chine mènent le carrousel des pressions extérieures.
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