Dans ce triptyque, l'auteur fait un essai de prospective sur le futur du combat en mer, prévoyant un cinquième âge – après la voile, le canon, l'avion et le missile – avec les actuels progrès technologiques. Révolution ou évolution ?
L’action navale au XXIe siècle, ou le cinquième âge du combat en mer (1/3) Quelle place et quelle finalité pour l’action navale au XXIe siècle ? (T 1395)
© Marine nationale
En 2022, caractériser les enjeux d’un XXIe siècle déjà bien entamé est un exercice répandu dans l’intégralité des compartiments de la puissance. Le champ militaire n’y échappe pas : de Revues stratégiques en Livres blancs, toutes les Nations se livrent régulièrement à l’analyse des rapports de force présents et à venir, et tentent d’en déduire la meilleure manière d’adapter leur appareil militaire, entre autres leviers, pour y faire face. Or, dans la symphonie du pouvoir, les forces navales redeviennent aujourd’hui, comme souvent dans l’histoire, l’un des principaux étalons de la puissance des États, dont l’espace aéromaritime constitue un lieu d’expression privilégié. Aussi, n’est-il pas inutile de s’intéresser aux grands déterminants de l’action navale d’aujourd’hui et de demain. Les cerner et comprendre leur dynamique, c’est se mettre dans les conditions de saisir les opportunités qui ne manqueront pas de se présenter, tout en évitant certaines impasses.
Pour la clarté du propos, commençons d’emblée par traiter deux questions autour de la notion d’action navale. Premièrement, l’action navale est-elle réductible au combat naval ? Non, bien sûr. On considérera ici l’action navale par le prisme extensif des opérations navales : non seulement aux quatre niveaux de la guerre (politique, stratégique, opératif et tactique), mais également dans ses trois modes d’expression, qu’il s’agisse de dissuader (la dissuasion est une forme d’action), de faire acte de coercition ou d’intervenir. Pour autant, caractériser l’action navale revient principalement à s’intéresser au combat naval, forme ultime d’exercice de la puissance navale. Aussi, sans prétendre réduire l’action navale au seul combat naval, on donnera à ce dernier, dans la suite, une place centrale. Deuxièmement, à l’heure de l’imbrication croissante des milieux (1) et des champs (2) de conflictualité, le terme « naval » n’est-il pas trop réducteur et ne devrait-il pas s’effacer au profit d’une approche plus globale de l’action « maritime » ou « militaire » ? Non, car le « naval » dont il va être question a ses spécificités. L’action navale n’est pas l’action maritime, qui lui est stratégiquement supérieure (3), pas plus qu’elle ne doit se diluer dans l’action militaire au sens large.
On verra à l’examen que l’action navale a franchi le seuil de ce qu’on a choisi de nommer ici le cinquième âge du combat naval. Ce nouvel âge succède, sans totalement les effacer, à ses quatre ancêtres : l’âge de la voile, l’âge du canon, l’âge de l’avion et l’âge du missile. Et nous verrons qu’en dépit d’un contexte physique et immatériel en rapide évolution, qui justifie l’identification d’un nouvel âge naval, la finalité de l’action navale et les principes qui la régissent brillent par leur stabilité.
Il reste 92 % de l'article à lire