Premier ambassadeur de France en Ukraine (1990-1993), Hugues Pernet analyse la question de la guerre par le prisme du nucléaire.
L’Ukraine paie un lourd tribut au nucléaire (T 1538)
Rafael Mariano Grossi, président de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) visite le site nucléaire de Zaporijia en Ukraine, le 29 mars 2023 (© IAEA Imagebank / Flickr)
Si la première moitié du vingtième siècle a vu l’Ukraine baigner dans son propre sang, la seconde a été celle de l’aboutissement d’un processus longtemps attendu, l’indépendance, mais sur lequel pesait une lourde hypothèque.
La prise de conscience de l’impéritie du pouvoir soviétique est apparue le 26 avril 1986 avec la catastrophe de Tchernobyl. Outre les drames humains et les répercussions écologiques, cet accident gravissime survenu sur un réacteur soviétique, dépourvu d’enceinte de confinement, allait avoir une incidence politique de très grande ampleur. Les Ukrainiens, dont la jeunesse sera sciemment exposée aux rayons ionisants lors du défilé du 1er mai 1986 organisé à Kiev alors que l’incendie faisait encore rage dans la centrale, prennent conscience qu’ils seraient mieux à même de gérer leur pays que l’oligarchie installée à Moscou. Le tribut au nucléaire civil était lourd, mais engendrait paradoxalement de l’espoir, la marche vers l’indépendance. Aujourd’hui, l’hypothèque demeure avec la centrale géante de Zaporijia.
Néanmoins, le plus inique est le tribut payé par Kiev au nucléaire militaire. Le paradoxe vient du fait que l’Ukraine soviétique, lorsqu’elle a revendiqué sa souveraineté le 16 juillet 1990, a exprimé sa volonté d’être dénucléarisée et neutre.
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