L'ambassadeur Bertrand Besancenot revient sur l'actualité du Moyen-Orient au mois de février en analysant l'action diplomatique et militaire des États-Unis, la position de Téhéran et celle du Hezbollah, à travers le prisme du conflit entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza.
Chroniques du Moyen-Orient – États-Unis, Iran, Hezbollah et crise Israël-Gaza (T 1579)
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Joe Biden marche sur un fil entre un soutien indéfectible affiché à l’État hébreu et sa volonté de calmer la situation au Moyen-Orient avant d’entrer de plain-pied dans la campagne électorale pour la présidentielle de novembre. Le président joue en effet sur différents tableaux. Face à la menace d’un retour de Donald Trump à la Maison-Blanche – sur lequel semble parier le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou – Joe Biden a les mains relativement liées pour influencer son allié en pleine guerre à Gaza. D’un côté, le chef de la Maison-Blanche tente de faire pression sur Tel-Aviv en offrant quelques concessions aux Palestiniens ; de l’autre, il utilise les leviers à sa disposition pour influer sur le cours de la guerre, souhaitant notamment la voir baisser en intensité et amener Israël à protéger les civils palestiniens.
Les leviers d’influence
Les États-Unis ont annoncé qu’ils mettraient leur veto à un projet de résolution de l’Algérie au Conseil de sécurité de l’ONU pour un cessez-le-feu à Gaza. Surtout, ils se préparent à envoyer une nouvelle cargaison de bombes et d’autres armes à l’État hébreu, alors même qu’ils s’opposent au projet israélien d’invasion de Rafah sans plan pour protéger les 1,5 million de Gazaouis qui s’y sont réfugiés pour fuir les combats. La livraison compte un millier de bombes MK-82 de 500 livres (227 kg), des détonateurs de bombes FMU-139, ainsi que des kits de KMU-572 (JDAM), capables de convertir des munitions non guidées en bombes à guidage de précision, selon des responsables américains cités par le Wall Street Journal. Au total, le lot d’armes atteint plusieurs dizaines de millions de dollars, que doit financer l’aide militaire américaine à Israël. Ce dernier a déjà reçu environ 21 000 munitions à guidage de précision de Washington depuis le début de la guerre en octobre dernier, rapporte encore le quotidien new-yorkais. Alors que la campagne destructrice d’Israël a fait près de 29 000 morts en moins de cinq mois, selon le ministère de la Santé administré par le Hamas, cette nouvelle livraison d’armes de précision traduirait-elle la volonté des États-Unis de vouloir limiter le nombre de civils tués à Gaza ?
Joe Biden entend utiliser ces leviers à sa disposition pour réaliser rapidement ses ambitions élevées pour le Moyen-Orient, auxquelles il espère lier la fin de la guerre à Gaza. Son objectif est de connecter la libération des otages israéliens à un accord de paix régional qui inclurait une solution à deux États, la normalisation des relations entre Israël et l’Arabie saoudite et l’arrêt des hostilités entre le Liban et l’État hébreu, avec un accord frontalier à la clé. Le 17 février, au cours de la Conférence de sécurité de Munich, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a ainsi déclaré au président israélien Isaac Herzog que Washington attendait d’Israël qu’il adopte des mesures significatives pour protéger les civils à Gaza. Au cours de cet événement, le chef de la diplomatie américaine a également évoqué « une opportunité extraordinaire » au Proche-Orient, liée au fait que « virtuellement, tous les pays arabes » souhaitent, à terme, normaliser leurs relations avec Israël, montrant que les États-Unis poussent Tel Aviv à accepter leur plan, alors que ce dernier devra faire des concessions significatives pour parvenir à un accord. « Quels que soient les projets ambitieux de l’administration Biden pour la paix israélo-palestinienne, mettez-les à exécution ! », a enjoint, sur le réseau social X, Aaron David Miller, chercheur au Carnegie Endowment for International Peace. « Difficile d’aggraver la situation », a-t-il ajouté.
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