L'ambassadeur Besancenot, dans sa chronique du Moyen-Orient, revient sur les suites de l'accord irano-saoudien signé il y a un an à Pékin. Entre rapprochement et hésitations dans le contexte de la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza, les deux grands de la région restent attentifs. Enfin, l'auteur analyse le rôle joué par le sultanat d'Oman dans les échanges entre deux adversaires systémiques, Washington et Téhéran.
Liens diplomatiques Riyad-Téhéran et rôle d’Oman dans les relations irano-américaines (T 1584)
© Lara Jameson / Pexels
Il y a un an, l’annonce avait surpris le Moyen-Orient et ses partenaires internationaux : le 10 mars 2023, l’Arabie saoudite et l’Iran signaient un accord de détente à Pékin, présageant une nouvelle ère voulue par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane (MBS), afin de réaliser son programme de diversification économique « Vision 2030 ». Toutefois, dans les mois suivants, l’accord n’a généré que quelques résultats diplomatiques limités, jetant un flou sur sa réelle portée. Il aura donc fallu la guerre à Gaza et l’ouverture de ses fronts annexes pour tester la viabilité de ce rapprochement. Le 7 octobre a en effet mis en lumière les capacités de destruction de l’Iran et de ses alliés dans la région, poussant l’Arabie saoudite à tout mettre en œuvre pour éviter un embrasement dans la région.
Ainsi, depuis octobre 2023, les contacts entre Riyad et Téhéran ont atteint des niveaux jamais égalés depuis une décennie – et ce malgré le constat, amer pour les Saoudiens, que l’Iran n’avait pas pu ou voulu empêcher l’attaque du Hamas. Dès le début du conflit, MBS et le président iranien Ibrahim Raïssi se sont en effet téléphoné pour évoquer l’escalade à Gaza. Ils se sont ensuite rencontrés en novembre, en marge du sommet conjoint de l’Organisation de la coopération islamique (OIC) et de la Ligue arabe sur la Palestine, première réunion entre des dirigeants iranien et saoudien depuis la rupture des liens diplomatiques en 2016 (la dernière datait de 2012, lorsque Mahmoud Ahmadinejad s’était entretenu avec le roi Abdallah à La Mecque). Les ministres saoudien et iranien des Affaires étrangères ont également multiplié les visites dans les pays l’un de l’autre depuis le 7 octobre, alors qu’ils s’étaient déjà rencontrés avant cette date, dans le sillage de l’accord de Pékin.
Plus intéressant encore, Riyad et Téhéran opèrent une forme de rapprochement sans précédent sur le plan sécuritaire, après s’être menés des guerres par procuration dans toute la région pendant des décennies. Mi-février, l’ambassadeur saoudien en Iran a rencontré le ministre iranien de la Défense. Une semaine plus tôt, une délégation de hauts gradés iraniens avait fait une apparition remarquée au World Defense Show de Riyad, où elle s’est entretenue avec le chef d’état-major saoudien. Son homologue iranien avait, lui, téléphoné au ministre saoudien de la Défense, Khalid ben Salmane, en décembre dernier.
Il reste 81 % de l'article à lire